Dernier tour de piste avant une pause créatrice pour le groupe pop expérimental brooklynois Yeasayer qui, en l'espace de deux disques et trois petites années, est passé de l'ombre à la renommée... et pourtant, le groupe jouait pour la première fois à Detroit lundi dernier, raconte le bassiste Ira Wolf Tuton. Au Club Soda mercredi soir.

«Ouais, c'est curieux qu'on visite Detroit pour la première fois, surtout qu'on a déjà joué dans quelques endroits bizarres au Michigan. Notre auditoire est plutôt dans les grands centres; New-York, Londres, Los Angeles. J'imagine que ça a autant à voir avec le style de musique qu'on fait qu'avec la manière dont les gens s'informent des nouveaux groupes», analyse le bassiste.

Architecte de formation (et philosophe dans ses passe-temps), c'est lui qui coule les fondations du son Yeasayer avec ses efficaces lignes de basse. Si Chris Keating amène la légèreté avec sa voix sur le second disque, l'excellent Odd Blood (paru début 2010 chez Secretly Canadian) et Anand Wilder bourre les chansons pop du groupe de guitares et claviers pétillants, Tuton tient la barre du navire et évite à Yeasayer de s'égarer dans la mare d'influences musicales qui tapissent les deux albums, du reggae à l'électro d'avant-garde, en passant par le rock indé et le new-wave.

Paru en 2007, le touffu premier disque All Hour Cymbals avait fait belle impression. C'est cependant Odd Blood qui a solidifié la notoriété du groupe, associé à cette volatile scène indie pop de Brooklyn dont font partie les Animal Collective et autres Dirty Projectors, pour peu qu'on puisse parler d'une vraie scène structurée, nuance le bassiste.

«Plus tu te consacres à ton métier de musicien, plus tu passes de temps avec d'autres musiciens, dit Tutor. On passe tous par les même festivals, alors on finit par se croiser et échanger. Si on vient du même coin, on parle de notre ville, on connaît les mêmes gens. On se comprend, on échange sur les grandes difficultés et les petites victoires de notre métier. Une ville comme New-York, c'est super pour rencontrer des artistes, et pas que des musiciens. Tous ceux que je connais y ont déménagé pour se trouver dans l'une des capitales culturelles du monde. C'est inspirant.»

Yeasayer y retournera d'ailleurs très bientôt, après avoir passé la dernière année et demie sur la route. De nouvelles chansons sont déjà en chantier, et on pourra en entendre des ébauches dès mercredi soir.