Deux disques récents de piano concertant offrent de telles similitudes qu'ils pourraient être le fait d'un seul concepteur. Ils ont pourtant des origines bien différentes.

Chez Naïve, le pianiste israélien David Greilsammer joue le deuxième Concerto d'Alexandre Tansman, la Fantaisie de Nadia Boulanger et la célèbre Rhapsody in Blue de Gershwin, avec l'Orchestre Philharmonique de Radio France que dirige Steven Sloane.

Chez ATMA, le pianiste canadien Ian Parker (cousin de deux Parker pianistes plus connus) joue le Concerto en sol de Ravel, le Capriccio de Stravinsky et, de Gershwin encore, le Concerto en fa, avec le London Symphony Orchestra dirigé par Michael Francis.

Les deux parutions comportent quelques éléments de surprise, le premier étant certainement de retrouver sous la marque québécoise ATMA le London Symphony, qui est l'une des formations majeures de la planète. Par ailleurs, un lien dans le temps existe entre les deux programmes. Ces compositeurs sont tous nés dans le dernier quart du XIXe siècle (entre 1875 et 1898), ils se sont connus, soit à Paris, soit à New York, et les six oeuvres, illustration de ce qui était alors «musique moderne», furent créées entre 1913 et 1932.

Trois sont familières: les deux Gershwin et le Ravel. On entend beaucoup moins souvent le Stravinsky, on n'entend jamais le Tansman et on ignorait jusqu'à l'existence du Boulanger. Quelques précisions s'imposent dans ces deux derniers cas. La légendaire pédagogue Nadia Boulanger, également compositrice et chef d'orchestre, dirigea la création de sa Fantaisie à Berlin en 1913 avec Raoul Pugno au piano, cependant qu'Alexandre Tansman, pianiste et compositeur français d'origine polonaise, créa son concerto à Boston en 1927 sous la direction de Koussevitzky.

Les deux principales raretés se retrouvent sur le disque de Greilsammer. Le Tansman, qui compte quatre mouvements, mêle plusieurs influences (musique russe, musique française, jazz) et le Boulanger est un puissant dialogue piano-orchestre d'une seule masse compacte de 20 minutes. Greilsammer livre les deux partitions avec force et aborde la Rhapsody in Blue avec imagination.

Ian Parker nous donne un Gershwin tout aussi convaincant, mais son disque se distingue surtout par les deux autres pièces: un Ravel exceptionnellement détaillé, un Stravinsky extrêmement virtuose et précis.

Orchestre et prise de son excellents sur les deux disques.

DAVID GREILSAMMER, pianiste. Tansman, Boulanger, Gershwin.

Naïve, V 5224 ****

IAN PARKER, pianiste. Ravel, Stravinsky, Gershwin.

ATMA, ACD22 656 ****