Bad Romance de Lady Gaga a été vu près de 300 millions de fois sur la chaîne VEVO de YouTube. Tous les jours, des gens mettent le lien de leur clip préféré sur leur profil Facebook ou reçoivent le courriel d'un ami qui s'exclame: «Connais-tu ce groupe? Leur clip est malade!»

Le web a donné une deuxième vie aux clips. Pas besoin d'être devant MTV ou MusiquePlus pour pouvoir en visionner. Les gens peuvent regarder les clips qu'ils veulent quand ils le veulent, sur leur ordinateur ou leur téléphone intelligent.

«L'époque où nous programmions le VHS pour enregistrer la reprise de notre clip préféré sur les chaînes musicales télévisuelles est révolue. Maintenant les clips sont beaucoup plus accessibles et se partagent facilement», indique Marie-Pier Létourneau, responsable des relations de presse et du marketing viral d'Indica Records.

Le clip est un bon outil promotionnel. MusiquePlus a mis sur la carte des groupes comme Les Trois Accords, souligne Marie-Pier Létourneau. Mais grâce à l'internet, il ne suffit que de quelques clics pour qu'un clip fasse rapidement le tour du monde. Les clips du groupe OK Go ont connu un succès viral monstre, de même que ceux du groupe sud-africain Die Antwoord.

Avant l'arrivée de YouTube, en 2005, le clip était en mauvaise santé: les MusiquePlus et MTV se sont mises à programmer de plus en plus d'émissions de téléréalité, alors que les maisons de disques ont diminué leur budget de clips. Nous étions loin de l'âge d'or du clip des années 80 et 90 avec des productions comme Bad de Michael Jackson, réalisée par Martin Scorsese avec un budget mirobolant.

Mais voilà que «les clips ont trouvé une nouvelle niche où ils peuvent vivre: l'internet», s'est récemment réjoui le célèbre réalisateur Michel Gondry, en entrevue avec le New York Times.

Avec le web, non seulement les possibilités de diffusion d'un clip sont multiples, «la forme est éclatée», souligne David Valiquette, réalisateur et producteur chez Dare To Care Records. «Il y a des formes hybrides: on ne peut pas dire si c'est une performance live, un court métrage ou un clip.» Récemment, Arcade Fire a fait un clip interactif avec sa chanson The Wilderness Downtown, par exemple, de même que Malajube avec l'ONF pour la chanson Contrôle.

Le tout premier clip que MTV a présenté le 1er août 1981 était la chanson des Buggles Video Killed the Radio Star. En 2010, pourrait-on affirmer: Internet Saved the Video Star?

Encore faut-il que l'argent soit là. «Les possibilités ne manquent pas avec le web. C'est le début de quelque chose, mais le problème est de savoir qui va financer tout ça», estime David Pierrat, réalisateur à la boîte Parce Que Films, dont le clip L'amour se meurt de Yann Perreau a été repiqué par le site de partage Vimeo.

Au Québec, c'est MaxFACT qui soutient la production de vidéoclips francophones. Le programme est géré par le fonds Harold Greenberg, financé par les revenus de MusiquePlus et MusiMax.

Avec le web, les deux chaînes télé musicales d'Astral n'ont plus le «monopole» des clips au Québec. «C'est un compétiteur de plus», convient Luc Doyon, vice-président principal et directeur général de MusiquePlus et MusiMax. Ainsi, ces deux chaînes misent davantage sur du contenu exclusif en lien avec la musique: lancement d'albums en direct des studios, critiques de disques, performances musicales, etc., autant sur le web qu'à la télé.

Si ce n'est pas MaxFact, qui financera les projets qui ne sont pas un clip traditionnel destiné à la télévision? Peut-être le Fonds des médias du Canada? Là est la question.

«On vient de tourner un clip avec Misteur Valaire avec des caméras 360 degrés qui n'est pas financé par MaxFact, souligne David Pierrat. Nous avons eu une bourse de Bande à part et des commandites.»

Conclusion de son collègue David Valiquette: «On n'arrêtera pas de faire des clips, car il n'y a pas d'argent. C'est un outil promotionnel, mais avant tout une forme d'art.»

Mais encore faut-il que les artisans du clip soient justement rémunérés.