Il y a trois ans, la tournée Tout écartillé de Robert Charlebois était très électrique et énergique. Cette fois, c'est en version plus acoustique et plus «avec toutes sortes d'instruments à cordes» que le «bum de bonne famille» s'est produit, mardi, à La Tulipe, transformée en boîte à chansons. Le spectacle Avec tambour ni trompette n'est pas encore tout à fait placé, mais Charlebois a réussi à «être d'dans», passé les premières chansons.

En fait, Charlebois était assez nerveux en début de spectacle et ne le cachait pas : la salle comptait beaucoup d'amis et de membres de la famille, ce qui n'est jamais facile. Est-ce pour cette raison ou parce que quelques réaménagements s'imposaient, toujours est-il que les six, sept premières chansons volaient au ras les pâquerettes, même s'il y était beaucoup question d'avions (Lindberg, Je reviendrai à Montréal).

Ce n'est pas faute d'avoir de bons musiciens, le trio qui l'accompagne - particulièrement le toujours incroyable Steve Gagné à la batterie (et parfois à la basse, en même temps!) - est constitué de très solides instrumentistes polyvalents. Mais Charlebois quasi acoustique, sans grosse guitare ni batterie qui défonce l'oreille interne, ça prend du temps à s'y faire, à commencer par le principal intéressé.

C'est pourtant quand il a chanté la très méconnue 10 ans (qui figurait sur l'album Solide en 1979, dans des arrangements qui la défiguraient) seul au piano que le spectacle a vraiment pris son envol, pour ne jamais redescendre. Y compris pendant un medley de quelques «meilleures pires» chansons de Charlebois! Medley qui gagnerait d'ailleurs à être allongé, tant il en va de certaines des plus atroces chansons de Charlebois comme du disco : 25 ans plus tard, on les aime pour vrai, ces morceaux, même si on les a appris de force, matraqués par la radio.

Après ça, Québec Love à trois ukulélés, Tout écartillé plus électrique, Les ailes d'un ange mené à fond de train par la salle, une nouvelle chanson country (Mes belles montagnes bleues, je crois), la magnifique Insomnie et tant d'autres belles chansons de Charlebois (dont les textes sont principalement signés par Réjean Ducharme, Marcel Sabourin, Charlebois lui-même et Mouffe) ont vraiment porté le spectacle un peu plus haut, un peu plus loin - malgré ou grâce aux farces parfois un peu faciles de Charlebois, mais efficaces.

La preuve en a été faite mardi : pour apprécier Charlebois à sa juste valeur, il faut vraiment que le rythme soit soutenu, qu'il s'appuie au tempo (ah, Le tempo, une des pires chansons de Charlebois qui nous a fait rire de plaisir mardi...), bref, que ça fasse un peu de bruit - Ordinaire au piano, c'est beau, mais quand la guitare électrique arrive, c'est écoeurant!

Un mot, enfin, pour souligner le très joli duo Marabu qui ouvrait la soirée. Pour reprendre les mots de mon copain Sylvain, ces espèces de «Everly Brothers de Beauport» proposent un genre peu usité au Québec, le folk californien. Le mariage de leurs deux voix et de leurs deux guitares était un pur plaisir, et leurs chansons candides, ensoleillées, mélodieuses au possible constituaient un délicieux casse-grippe musical.

Robert Charlebois, Avec tambour ni trompette à La Tulipe jusqu'au 30 octobre, en supplémentaire le 4 décembre et en tournée.