Soirée des dames, hier, alors que notre trajectoire festivalière nous a amenés de Madeleine Peyroux et Eleni Mandell à Florence K. qui célébrait, par deux concerts sur la Place des festivals, son histoire d'amour avec le public québécois. Lequel lui a permis de décrocher un disque d'or (80 000 exemplaires écoulés) pour son album La Historia de Lola.

De nouveau, le Festival de jazz a joué de chance en cette soirée à la météo instable. La pluie a fini par se calmer, puis a complètement cessé, vers 21h30, en plein milieu du premier spectacle de Florence K. Sauvée par les eaux, qui n'ont toutefois pas épargné Lynda Thalie. La pauvre, elle a tout fait pour remonter le moral des téméraires festivaliers qui voulaient profiter de sa belle voix et de ses mélodies caressantes, envers et contre le déluge qui s'abattait sur le centre-ville. «Vous êtes beaux avec tous vos parapluies!» a-t-elle lancé...

 

Ça s'annonçait mal pour le premier spectacle de Florence K., à 21h. Or, à l'arrivée sur scène de la demoiselle et de son bel orchestre de 11 musiciens tous vêtus de blanc - cuivres, cordes, percussions, guitares, basse -, l'averse semblait déjà s'essouffler. Son interprétation de Las Calles del Sur, sur un rythme afro-cubain propulsé par les cuivres, balayait l'eau qui ruisselait sur les parapluies.

Du joli, tout ça, respectueux, aux orchestrations riches et dans les règles de l'art sud-américain. Toute populaire soit l'approche de Florence K., il faut bien reconnaître que la demoiselle a du talent et, surtout, du goût. Elle passe sans gêne d'une salsa à une samba, de l'espagnol au portugais, sans frelater ses références musicales dans un enrobage pop grand public. Le respect qu'elle porte aux rythmes d'ailleurs est celui d'une authentique amoureuse des cultures du Sud.

C'était fort agréable, malgré l'humidité décidément incrustée dans ce début de Festival de jazz. La musique de Florence K. sait être torride - même lorsqu'elle se fend d'une ballade blues comme le classique d'Etta James, I'd Rather Go Blind, qu'elle s'approprie d'élégante et sensible manière bien que sa voix puisse paraître trop «parfaite» pour une chanson aussi dure. Reste que la bossa, c'est meilleur quand il fait chaud.

Madeleine est revenue!

À l'abri des intempéries, Madeleine Peyroux nous recevait au Théâtre Maisonneuve pour un tour de chant soul, r&b, blues (et un peu jazz, quand même) des plus cajoleurs. «Que des chansons d'amour», a-t-elle annoncé en début de spectacle. Elle a une de ces voix, la Peyroux, un timbre nasal qui s'apparente à celui de Billie Holiday (je sais, la comparaison est usée...), mais avez-vous remarqué combien son accent anglo est plus prononcé lorsqu'elle chante en français que lorsqu'elle nous cause? Parfaitement bilingue, la musicienne. Pourtant, sa Javanaise de Gainsbourg avait un petit je-ne-sais-quoi d'outre-Manche.

Bref, c'était parfait, son interprétation à elle comme le jeu de ses musiciens, batteur, guitariste électrique (quel beau son!) et pianiste/organiste, fort inspiré lorsqu'il s'appuyait sur son Hammond B3. Bien qu'elle n'ait jamais quitté le coeur de ses fans montréalais, Madeleine Peyroux fait ces temps-ci un retour en force grâce au récent Bare Bones, peut-être son meilleur disque depuis Dreamland, en 1996. Hier soir, elle nous a fait voyager à travers sa courte discographie, à travers ses propres mots et ceux des autres, Dylan entre autres, et Cohen, dans une touchante version de Dance Me to the End of Love (qu'elle a enregistrée sur Careless Love, en 2004).

À 19h, Eleni Mandell retrouvait ses fidèles fans montréalais au Club Soda. Robe rouge scintillante et guitare électrique au cou, ses trois fidèles collaborateurs (basse, batterie et guitare) à ses côtés, elle a revisité son répertoire à la lumière des amplis qui réchauffent le son d'Artificial Fire, son plus récent album, plus pesant, abrasif.

Un drôle de fauve que cette Eleni, frondeuse, fragile mais farouche, économe dans ses interactions avec la foule, dévoilée dans ses chansons éminemment personnelles. Une fille magnétique et fascinante, dont les chansons, qui tiraient plus bruyamment vers le rock, revenaient souvent dans des ambiances confidentielles, où le contact avec la foule se fait plus naturellement.