«Tu sais quoi? demande le globetrotteur argentin Federico Aubele. Avant de m'installer à New York il y a quelques mois, j'ai songé à déménager à Montréal... Le fait que les gens y parlent français, le côté à la fois européen et américain, qui n'est pas sans rappeler Buenos Aires - mais en moins chaotique! -, tout ça me fait vraiment apprécier votre ville.» Sentiment réciproque, selon toute vraisemblance, puisque le chanteur et producteur pop électro-latino ne manque jamais de trouver son public à chacune de ses visites.

La dernière fois, il s'est produit à la Sala Rossa; le Festival de jazz l'avait invité en salle à deux reprises auparavant, en 2005 et 2007. Cette fois, ce sera l'opération grande séduction: deux concerts extérieurs ce soir (à 21 h et 23 h, sur la scène du Festival) pour lui assurer une plus grande exposition aux festivaliers montréalais.

Séduction, il n'y a pas meilleur mot. Son dernier album, Amatoria, lancé fin mai, a été annoncé comme le plus personnel de sa courte discographie. «Parce que d'abord, pour la première fois, j'y chante», explique celui qui avait l'habitude d'inviter des chanteurs. «J'y joue aussi de tous les instruments, mais s'il est si personnel, c'est parce que j'y parle de mes relations amoureuses comme je ne l'avais jamais fait auparavant.»

Plus doux, langoureux et pop que les Gran Hotel Buenos Aires (2003) et Panamericana (2007), qui nous avaient permis de nous familiariser avec l'univers électro-pop d'Aubele, Amatoria ramène quand même au premier plan l'identité argentine de son auteur.

«C'est curieux parce que les réactions sont plutôt positives à propos de ce disque, mais en même temps, j'ai surtout l'impression de gagner de nouveaux fans, estime-t-il. Je sens que plusieurs de mes anciens fans, qui appréciaient le côté rythmé et groovy de mes précédents disques, ont moins accroché sur la musique d'Amatoria

«D'un autre côté, poursuit-il, on ne vient pas à mes spectacles en espérant danser du début à la fin. À Montréal, ce sera très doux. Cinq musiciens - Aubele inclus - monteront sur scène pour reproduire les ambiances délicates et finement accrocheuses du compositeur, qui incorpore à sa pop autant d'éléments électroniques que de références au tango argentin, à la bossa brésilienne ou au bolero mexicain.

«Pourtant, je ne peux pas dire que je suis un grand connaisseur de tango; j'y ai été exposé, un peu comme tous les Argentins, et j'apprécie la musique du Piazzola, mais ma culture tango s'arrête pas mal à ces grands de la scène. Ces racines musicales sont cependant très importantes pour moi, comme si, étant éloigné de l'Argentine, elles ressortaient tout naturellement dans ma musique.»

Expatrié en 2001, «au moment de la crise économique qui sévissait, c'était pour moi le signal qu'il fallait partir», Aubele a tour à tour habité Berlin, Barcelone, Washington (où se trouvent les bureaux de son label, Eighteenth Street Lounge, propriété du duo Thievery Corporation) et, plus récemment, New York, «où je commence seulement à me sentir à l'aise. C'est une belle ville, et c'est facile d'y travailler».

Vous n'avez pas un peu le mal du pays, Federico? «Je suis toujours content lorsque j'y retourne pour retrouver la famille et les amis proches, dit-il. Mais je semble incapable de rester en place, il faut toujours que j'aille voir ailleurs. Étrangement, je sens que les acteurs de la scène musicale en Argentine me considèrent comme une sorte d'étranger...»

Comme on dit, nul n'est prophète...

 

En un mot

Nouveau chouchou des Montréalais, il fait du lounge pop aux accents de tango.

Dernier disque

Amatoria, Eighteenth Street Lounge (2009).

À écouter

Luna y sol