Billie Joe Armstrong, le leader de Green Day, a accusé Wal-Mart de vouloir censurer son album 21st Century Breakdown en refusant de l'offrir dans ses magasins aux États-Unis, rapportait cette semaine Associated Press. Gros scandale? Euh, pas vraiment, non. Il y a cinq ans, le géant du commerce de détail avait aussi refusé de vendre American Idiot.

L'irritation de Green Day est compréhensible: ne pas être disponible dans cet important magasin grande surface a un impact certain sur les ventes de ses disques. 21st Century Breakdown, qui s'est écoulé à 215 000 exemplaires en trois jours la semaine dernière, souffrira sans doute un peu de cette exclusion.

L'accusation de censure semble toutefois relever de la stratégie publicitaire: il y a des années que Wal-Mart a décidé de ne pas heurter ses clients les plus chatouilleux en n'offrant aucun disque portant la mention « contenu explicite» aux États-Unis. L'industrie du disque s'est d'ailleurs ajustée depuis longtemps, puisque les producteurs proposent souvent des versions dites «propres» des albums potentiellement litigieux. Un compromis que Green Day refuse.

Billie Joe Armstrong estime qu'il n'y a rien d'offensant dans 21st Century Breakdown. Son contenu est effectivement loin d'être aussi explicite que celui de Relapse, le dernier Eminem. En attaquant Wal-Mart, il se trompe toutefois de cible: ce n'est pas le détaillant qui choisit quel disque portera le célèbre logo, mais les producteurs de disques.

Le programme Parental Advisory Label (PAL) a été mis en place au début des années 90 par la Recording Industry Association of America (RIAA), le regroupement des géants américains du disque, dans la foulée des pressions exercées par le Parents Music Ressource Center à partir du milieu des années 80. Ce groupe formé de quatre mamans - dont Tipper Gore, la femme de l'ancien vice-président Al Gore - était très inquiet de l'influence néfaste de la musique populaire sur leurs beaux enfants.

Ainsi, pour ne pas choquer les parents susceptibles - la RIAA elle-même affirme que les jeunes ne font pas tellement attention aux paroles -, les compagnies de disques ont mis en place ce système d'étiquette, parfois ironiquement baptisé «Tipper Sticker». Puisque le PAL n'est pas géré de manière centralisée, son application peut sembler aléatoire.

Billie Joe Armstrong peut bien parler de censure, mais qu'il en accuse d'abord Reprise et Warner, les deux compagnies avec lesquelles il est lié. Sauf qu'une manchette affirmant que Green Day est en litige avec sa compagnie de disques, c'est beaucoup moins sexy qu'une autre mettant en cause Wal-Mart...

Eminem, canon de 2009?

Sans qu'aucun chiffre officiel ne soit disponible, plusieurs sites annonçaient que Relapse d'Eminem allait faire son entrée directement en première position du palmarès la semaine prochaine. Des pronostiqueurs lançaient même le chiffre de 615 000 exemplaires en six jours, ce qui en ferait le départ canon de 2009. N'importe qui peut prédire qu'Eminem sera un numéro 1, le seul rival sérieux de Relapse a été publié... quatre jours plus tôt.

Warner a en effet commercialisé 21st Century Breakdown de Green Day un vendredi, alors que les disques arrivent généralement en magasin le mardi. En agissant de la sorte, Warner a précisément évité un face-à-face qui aurait probablement été remporté par Eminem. Parce que les disques du rappeur, eux, sont disponibles en version «clean» dans les magasins Wal-Mart. Eminem est sans scrupules, c'est bien connu.