C'était encore «concert-fleuve» jeudi à MusiMars, mais cette fois la soirée faisait trois heures très exactement, pas une minute de plus, et l'accent n'y était pas mis sur l'énorme et significative différence de durée qui existe entre certaines oeuvres, comme les précédents. Le thème était plutôt d'ordre «spirituel», encore que certaines oeuvres n'offraient absolument rien de ce genre-là.

Ainsi, L'indocile, de Félix Frédéric Baril. Un duo pour violon et clarinette-basse. Étrangement, la chose nous ramenait à l'idée de temps car elle semblait durer une heure alors qu'elle ne faisait que 10 minutes. La petite violoniste avait l'air d'aboyer devant sa consoeur clarinettiste, qui réagissait à peine. Il y avait là matière à un hors-d'oeuvre de deux minutes au maximum - pas 10.

 

Cette «World Premiere» (pour citer la brochure) avait été précédée plus tôt dans la semaine d'une autre «World Premiere» du même Baril tout aussi dépourvue d'intérêt. Si ce garçon a quelque talent pour la composition, il ne l'a pas encore montré. Qu'il se retrouve deux fois à MusiMars s'explique d'une seule façon: il est l'élève de Denys Bouliane, le patron du festival. S'explique, mais ne s'excuse pas.

Les deux travaux de l'obscur Alexander Raskatov, de Russie, présent dans la salle peu remplie, offrent un peu plus de substance. Un peu. On voit d'abord la blonde soprano dramatique Elena Vassilieva (Mme Raskatov) glisser sur des quarts de ton et imiter les instruments qui l'entourent, avant de terminer sur un cri épouvantable. Bouliane dirige ensuite un orchestre de 26 musiciens presque statique dont les petits bruits s'apparentent à la musique subliminale.

Le concert s'ouvrait par un solennel défilé de six personnes et la cinquième Symphonie, dite Amen, de Galina Ustvolskaya. Je n'ai rien noté de particulier sauf le texte du Notre Père dit en russe et scandé par des coups de marteau sur une planche de bois.

Le quatuor à cordes attendu pour deux pièces de Webern est retenu à San Francisco et remplacé par un pianiste iranien, Ashkan Behzadi, qui a mémorisé les très arides Variations op. 27 du même Webern et les joue avec conviction.

L'autre quatuor à cordes annoncé est là. C'est le jeune Roddick, de McGill, qui traduit adéquatement la finesse et l'humour que le Britannique Thomas Adès a mis dans Arcadiana.

En fin de compte, seul émerge de ce lourd programme le spectaculaire Et exspecto resurrectionem mortuorum, de Messiaen, pour bois, cuivres et percussions métalliques. Le très attentif Alain Cazes obtient de tous ces jeunes une lecture fidèle à la partition, c'est-à-dire extrêmement précise et d'une puissance presque assourdissante par moments.

MusiMars se termine ce soir, 19h30, à Pollack. Rappelons que John Adams, qui devait y diriger l'une de ses oeuvres, sera remplacé au pupitre par Denys Bouliane.