Il y a 15 ans, Térez Montcalm avait surpris le Québec avec sa voix d'écorchée vive, son jazz-pop fiévreux et sa personnalité hors du commun, le tout réuni sur un disque intitulé Risque. Mardi prochain, Térez Montcalm va surprendre le Québec - et l'Europe - avec... oui, sa voix, son jazz et sa personnalité, mais aussi un cinquième album de grande qualité, peut-être son meilleur à ce jour, baptisé Connection.

Trente-huit pages. Il y a 38 pages dans le dossier de presse européen de Térez Montcalm, juste pour l'année 2007! Et dans la majorité des cas, ces articles sont bel et bien des entrevues et des critiques dithyrambiques de Voodoo (2006), précédent album de l'incandescente Térez, et de son spectacle, dans la presse généraliste, mais aussi dans les revues spécialisées en jazz!

 

Car, à raison de 15 ou 16 voyages aller-retour par année, Miss Montcalm a donné plus de 150 spectacles en Europe, dans des salles et des boîtes réputées, sans compter des tas de festivals de jazz. Son nouvel album bilingue, Connection, sera lancé en septembre sur le Vieux Continent par Universal (avec 13 morceaux plutôt que 11, sur la version québécoise), et, oui, elle a déjà plein de représentations dans son agenda outre-Atlantique.

Coudon, Térez, est-ce parce qu'on ne t'a pas beaucoup vue depuis 2006 que la première chanson de ton disque, Si je t'ai déçu (dont elle signe texte et musique) a presque des allures de déclaration d'amour à ton public délaissé? «Pantoute, c'est vraiment une chanson sur les niaiseries qui peuvent se passer dans un couple, va pas chercher plus loin!» rétorque, paf, la chanteuse, guitariste, auteure et compositrice. Ah, c'est bien notre Térez Montcalm, on ne nous l'a pas changée, c'est clair.

Quoique, dans le livret de ce Connection, elle apparaît avec une touche «glamour», avec fourrure, bijoux... et jeans. Mais le raffinement réel, le vrai, c'est sur l'album qu'il se trouve, réalisé de main de maître par Michel Cusson. Qui avait réalisé également Voodoo. «Oui, mais c'est tout ce qu'il avait pu faire sur Voodoo, explique posément la chanteuse. Alors que sur Connection, Michel joue de la guitare sur tous les morceaux et parfois aussi du piano, il a fait les arrangements et a composé deux musiques! Et il s'est équipé en micros, c'est pas croyable: crinque ce disque, écoute-le fort, tu vas voir qu'il sonne vraiment bien, c'est extraordinaire.»

«Et c'est Michel qui décide: moi, je lui ai apporté des tas de chansons, des maquettes, je les lui ai fait écouter, et c'est lui qui a dit «oui, ça, c'est cool, ça, non»», reprend-elle. Toutes les chansons, on les a enregistrées live, tous ensemble en studio, en quelques prises, pas de correction ou de patch ou de ci ou de ça. Comprends-moi bien: Michel ne me dit pas comment chanter ou jouer de la guitare, il me dit ce qui me convient comme chanson. Parce qu'il le sait.»

Ah ça, disons que Cusson sait incroyablement ce qui convient à Térez Montcalm. Attendez d'entendre Where the Streets Have no Name de U2, très, très guitare et jazzy. Ou I'll Be Seeing You, un standard magnifiquement interprété par la fervente Térez («Celle-là, je l'ai enregistrée en chantant et en jouant de la guitare en même temps, je trouve que je chante souvent mieux comme ça»). Ou C'est extra de Léo Ferré, dont je me contenterai de dire que c'est une version incroyablement torride: «C'était une demande de Universal, dit Térez, je ne la connaissais pas vraiment, j'en ai écouté une couple de versions et je l'ai enregistrée en trois prises!» Eh ben dis donc... Quant à C'est magnifique de Cole Porter (en version française signée François Llenas), c'est une chanson que la mère de Térez a toujours chantée: «C'est une Marceau, ma mère, et les Marceau, c'est des «chanteux»!»

Et que dire de sa très belle relecture de Je n'attendais que toi de Charles Aznavour? «C'est-tu assez beau, cette chanson-là? Elle n'existe que dans un film, Édith et Marcel de Claude Lelouch, et on y voit Aznavour, le vrai, qui chante dans une scène magnifique avec la fausse Édith, sous une grosse couverte, pour ne pas réveiller le grand amour de Piaf, Marcel... C'est une des plus belles scènes d'amour au monde!»

Et les chansons inédites de Térez Montcalm? Elles se défendent très bien aux côtés de ces classiques, que ce soit Private Lies ou Connection, deux morceaux en anglais dont Cusson signe la musique, ou Le requin danse, un petit jazz à la Nougaro dont les paroles et la musique sont de Térez, qui explique en riant: «Le monde pense que je parle d'un homme dans cette chanson-là! Ben non, je parle d'un requin, d'un vrai. J'adore les requins, ce sont des animaux super intelligents, qui survivent à tout. Écoute, j'ai même un gros requin tatoué sur un bras!» Et la reprise de Risque, sa propre chanson de 1994? «Ça, c'est Michel qui a insisté. Moi, j'avais peur que le monde d'ici trouve ça cheap. Mais tu vois, c'est vraiment Michel qui décide de ces affaires-là. Michel, c'est mon frère.»

Disons que Michel peut être fier de sa «soeur».