United Steel Workers of Montreal lance ce soir Three on the Tree, son troisième disque, avec un concert au Club Soda. Rencontre avec ce groupe de country-bluegrass juste assez punk.

Dans le petit studio de Saint-Henri, les murs sont placardés de boîtes d'oeufs en carton. «Pourquoi? Parce que c'était gratuit, répond Gern f, guitariste et chanteur. Le gars du Café Joe sur Saint-Antoine nous en a donné des piles et des piles. On s'en sert pour dissiper le son. Et tu sais quoi, ça marche!»

 

Nous sommes dans les locaux d'UrbanHanded Works, boîte de création multimédia cofondée par Gern, qui sert aussi de local de répétition au groupe. Les murs sont un peu croches et le plancher craque. Studio, bureaux et espace de répétition se chevauchent dans le bordel ambiant.

Avec ses cheveux rasés sur le côté, sa petite brosse et sa carrure de frigidaire rembourré, Gern parle comme on l'imagine. D'une voix rauque, sèche et usée. Il en sort quelques conneries, mais jamais de bullshit.

Nos questions trouvent réponse en un mot. Mais il continue quand même de placoter, par plaisir. On parle des racines ouvrières de United Steel Workers of Montreal (USWM).

«À notre dernier passage à Hamilton, les syndicats avaient convaincu leurs membres d'assister au concert. On leur a vendu tous nos t-shirts XXXL», blague l'Ontarien, établi à Montréal depuis environ 15 ans.

Comme lui, le reste de la troupe habite ici dans le Sud-Ouest - Petite-Bourgogne, Saint-Henri et Pointe-Saint-Charles. Certains sont natifs du coin, d'autres d'Ontario ou d'une ferme perdue en Saskatchewan. La bande s'est formée au fil de jam sessions organisées dans les pubs du centre-ville. D'ailleurs, quatre des six membres ont longtemps été barmans au Bruitopia, au Grumpy's et ailleurs. Plus maintenant.

«L'année dernière, on a donné environ 60 concerts partout au Canada et aussi en Europe (France, Pays-Bas, Belgique...), en plus de préparer ce disque. Ça devenait trop difficile de nous libérer de nos boulots. Alors, on les a lâchés. On a un peu la trouille», lance d'un rire amusé la chanteuse Felicity Hamer, une rouquine coquettement tatouée.

La route ennuie

Gern ne s'en émeut pas plus. Il a l'habitude de bouger. Pendant 18 ans, il a travaillé comme camionneur.

«L'ennui. C'est ce qui explique que les camionneurs finissent souvent par chanter ou écrire. T'écoutes la radio - aucun vieux routier n'écoute la radio commerciale, on devient fou à force d'entendre la même musique d'un océan à l'autre. T'écoutes CBC ou NPR, donc, surtout des émissions parlées, et tu imagines des histoires...»

Three on the Tree, troisième disque de USWM, est un peu moins personnel. Il contient beaucoup d'histoires écrites par Gern et Gus Beauchamp. «Au lieu de parler de sa voiture en panne et de sa blonde qui le laisse, Gus chante maintenant les histoires d'autres gars qui vivent exactement la même chose», blague Gern.

La plupart des pièces se déroulent à Montréal. Une traite des «émeutes» du Canadien en avril. Sans surprise, le vieux réflexe contestataire ressort. Mais au moins, le ton convient à la musique - country et bluegrass rugueux, dont l'approche ressemble plus au punk qu'au trip d'instrumentiste.

Ce soir, USWM sera au Club Soda, «notre plus grosse salle à date à Montréal». Trois heures de musique sont prévues. Quelques autres groupes monteront aussi sur scène. Jonas, un ancien collègue barman du Bruitopia, pourrait les rejoindre. «Il joue au Centre Bell le même soir. S'il réussit à prendre un taxi à temps, il sera là», prévoit Felicity.

Avant que l'interview en franglais ne se termine, UNSW insiste pour se débarrasser d'une étiquette. «Je ne voudrais pas qu'on soit perçu comme étant un groupe anglo de Montréal. On est un groupe de Montréal, tout simplement.»

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United Steel Workers of Montreal, en concert ce soir au Club Soda. Nouveau disque Three on the Tree en magasin.