Début d'année funeste pour les amateurs de rock: Ron Asheton, guitariste des mythiques Stooges, a été retrouvé sans vie mardi dans son appartement d'Ann Arbour, au Michigan. Selon les premières indications, le redoutable instrumentiste serait mort d'une crise cardiaque dans les heures, voire les jours, précédent la découverte de son corps. Il était âgé de 60 ans.

Fondé à Ann Arbour en 1967, The Stooges a bouleversé l'histoire du rock en préfigurant le mouvement punk grâce à ses chansons subversives et ses performances explosives. Durant les sept années de sa première vie musicale, le trio a eu le temps de lancer trois albums qui ont fait époque: The Stooges (1969, réalisé par John Cale), Fun House (1970) et Raw Power (1973), albums pas toujours bien reçus par la critique à l'époque (l'histoire s'est depuis chargé de réécouter ces classiques du rock) et considérés comme des échecs commerciaux.

Sur ces enregistrements comme sur scène, le jeu du guitariste (et bassiste sur certains enregistrements) Asheton était obnubilant. Propulsé par les rythmes assommants de son frère Scott, Ron arrachait les tympans en jouant de manière à la fois brute et spontanée, sans fioritures, d'une simplicité telle qu'elle pouvait porter ombrage à son souci des textures sonores.

Le regretté Asheton n'était pas un grand technicien, ni même le meilleur instrumentiste de son époque - le magazine Rolling Stone l'avait toutefois classé en 29e position dans son palmarès des 100 meilleurs guitaristes de tous les temps. Le «son» Asheton, qu'il générait à l'aide de pédales fuzz, était en effet unique: abrasif, assourdissant, résolument avant-gardiste.

«Notre son a effectivement un pouvoir, confiait Ron Asheton à La Presse, l'été dernier. Le rythme, les guitares, c'est presque hypnotique, ça rend les gens fous!» Les trois membres des Stooges - le guitariste, son frère Scott (batteur) et le chanteur Iggy Pop - s'étaient retrouvés en 2003, 29 ans après avoir jeté la serviette, de longues années durant lesquelles Ron Asheton s'est consacré à différents projets. Le groupe reformé a enregistré The Weirdness, paru l'année dernière.

«On s'est accrochés juste assez longtemps pour pouvoir en profiter!» nous confiait alors le défunt guitariste, ravi de pouvoir renouer avec la scène et, surtout, avec un auditoire qui appréciait désormais The Stooges à sa juste valeur. «À l'époque, on faisait des premières parties; après trois chansons, c'était le silence total dans la salle, disait Asheton. Je crois, finalement, que les Stooges sont comme un bon vin ou un bon cigare: il faut le laisser vieillir pour bien l'apprécier.» Les fans québécois ont d'ailleurs eu la chance d'applaudir le groupe au mois d'août dernier, dans le cadre du festival Osheaga, à l'occasion du tout premier (et, malheureusement, dernier) concert de The Stooges à Montréal, un événement encore frais à la mémoire des spectateurs chanceux.

Pour la sixième fois, The Stooges est d'ailleurs finaliste pour une intronisation au Rock and Roll Hall of Fame en 2009; les nouvelles «légendes» retenues seront annoncées d'ici la fin du mois.