Avec l'arrivée du jeune compositeur Nicolas Bernier à la barre d'Akousma, on assiste à un changement de garde dans la direction artistique de ces quatre programmes acousmatiques présentés en autant de soirs.

Acousmatique? Voici le procédé: assis confortablement au Monument National, on s'immerge dans les univers de compositeurs électroacoustiques sélectionnés par l'état-major de Réseaux, cette société de concerts qui présente Akousma pour une cinquième fois. Plongés dans le noir, les mélomanes bénéficient d'une amplification (très) haute fidélité et absorbent ainsi cette matière sonore.

Au fil des quatre programmes se succéderont des compositeurs issus de générations, cultures, nationalités et horizons différents: Martin Messier, Jacques Poulin-Denis, Pete Stollery, Sébastien Rioux, Georges Forget, Phroq, Christian Bouchard, Robert Normandeau, Darren Copeland et Andreas Kahre.

«Je veux présenter tout le spectre. On a souvent l'impression que la musique électroacoustique est austère, ce qui n'est pas vrai», souligne le nouveau directeur artistique de Réseaux. Nicolas Bernier, 30 ans, a remplacé Robert Normandeau, Gilles Gobeil et Jean-Francois Denis. Ces derniers ont longtemps partagé le leadership de Réseaux et siègent désormais dans un comité artistique de l'organisation.

Inutile d'ajouter que Nicolas Bernier voit d'un bon oeil l'arrivée de sa génération dans le portrait des musiques électroniques dites savantes.

«Comme plusieurs compositeurs de mon âge, je suis éclectique. Je fais de la performance, de la musique pour la danse ou le théâtre. Je ne suis pas issu d'une tradition classique instrumentale. J'ai écouté beaucoup de musique électroacoustique et de musique actuelle. Bien sûr, la musique classique m'a influencé... comme les autres.» À l'origine, Akousma a été mis sur pied pour sortir les concerts acousmatiques de leur cadre, en associant la recherche sonore à celle d'éléments visuels - vidéo, projections, etc. Nicolas Bernier, lui, compte se démarquer autrement: «Je reviens au son unique avec des concerts pour la plupart présentés dans le noir. Là où ça éclate, cependant, c'est dans la diversité des esthétiques.»

Il enfile le programme d'Akousma pour illustrer son affirmation.

«Demain soir (mercredi), l'Écossais Pete Stollery s'inscrit dans la tradition des musiques acousmatiques comme Réseaux en présente depuis longtemps. Pour ce même soir, nous avons programmé la seule performance incluant des éléments visuels. Martin Messier et Jacques Poulin-Denis se feront face et se mettront à dessiner. Les sons émanant des crayons et du papier seront captés et traités en temps réel.

«Jeudi, le compositeur montréalais (d'origine française) Georges Forget a l'habitude de travailler sur des motifs, une démarche un peu comparable à celle de son compatriote Sébastien Roux. Ce compositeur français présente un projet conçu à partir d'instruments acoustiques. C'est mélodique à la rigueur, ça flirte un peu avec la pop.

«Vendredi, le Suisse Francisco Meirino alias Phroq fait dans le bruitisme. Personnellement, je vois un rapport entre ce qu'il crée et ce que composent les électroacousticiens. C'est un peu violent mais c'est vraiment bien construit. Au même programme, Christian Bouchard a déjà enregistré sur l'étiquette montréalaise Empreintes Digitales. Ce que j'ai entendu de son travail récent est super contrasté; il passe aisément d'un discours minimal à un langage très rude. C'est notre soirée hardcore!

«Samedi, on termine avec nos «classiques». Robert Normandeau, notre vedette internationale de l'acousmatique, présentera trois pièces dont une création. Darren Copeland (qui a fondé créé l'organisme NISA, un peu l'équivalent de Réseaux à Toronto) a fait beaucoup de pièces destinées à la diffusion radiophonique. Il utilise notamment la voix dans son travail. Avec la collaboration de l'artiste multidisciplinaire Andreas Kahre, il présentera une pièce sur le thème de l'eau. Pour ce, il a notamment effectué des prises de son sous-marines!» Immersion, avez-vous déduit?

Jusqu'à samedi à compter de mercredi soir, Akousma est présenté au Monument National, 20h. Également mercredi, Super Musique présente la soirée Ça cogne au Cabaret du Musée Juste pour rire avec une rencontre sur scène entre le guitariste anglais Fred Frith et la percussionniste québécoise Danielle Palardy Roger. Leur album Pas de deux sera lancé par la même occasion. La première partie sera assurée par les percussionnistes et créateurs montréalais Michel F Côté et Isaiah Ceccarelli. Le tandem lance aussi un album: Vulgarités.