Le Québec et l'Ontario font front communs pour exiger un rehaussement du financement de Radio-Canada.

Les deux provinces souhaitent que l'avenir du diffuseur public fasse partie des enjeux de la prochaine campagne électorale fédérale.

Affaiblie par des vagues de compression, la Société Radio-Canada n'est plus en mesure de remplir sa mission auprès des communautés francophones et acadiennes, a fait valoir, jeudi, le ministre responsable des Affaires intergouvernementales et de la Francophonie canadienne, Jean-Marc Fournier.

Flanqué de sa vis-à-vis ontarienne Madeleine Meilleur, M. Fournier a rendu public un rapport accablant sur le niveau de sous-financement de la société d'État.

Produit par le consultant expert Michel Houle pour le compte des gouvernements québécois et ontarien, le rapport révèle que les crédits parlementaires alloués à Radio-Canada ont crû de 0,5% entre 1990 et 2014, alors que l'Indice des prix à la consommation (IPC) progressait de 51%. Pendant la même période, les dépenses du gouvernement fédéral ont augmenté de 74%.

Même si la croissance des revenus publicitaires de la société d'État a été deux fois plus importante que l'IPC entre 2005 et 2014, elle n'a pas permis de compenser la diminution des fonds fédéraux.

«Donc, le problème n'est pas au niveau de la capacité de Radio-Canada de générer de nouveaux revenus, mais au niveau de la perte du financement public direct et indirect», a souligné l'auteur du rapport, présent aux côtés de M. Fournier et Mme Meilleur.

Bulletins de nouvelles régionaux amputés, diminution de la couverture locale, postes supprimés, les compressions des dernières années ont eu un impact «destructeur» sur les services de langue française de Radio-Canada partout au pays, a soutenu la ministre Meilleur.

«Le plein épanouissement de la Francophonie canadienne repose sur la capacité de notre seul diffuseur public national à combler son mandat légal de représenter l'ensemble des communautés francophones au pays. Il va sans dire que les vagues de compressions financières ont eu un impact destructeur sur les services de langue française», a-t-elle déclaré.

Le rapport Houle formule cinq recommandations pour remettre la société d'État sur les rails. Il propose en outre d'accroître, sur une période de trois ans, les crédits de Radio-Canada au niveau où ils étaient en 2008-2009, soit 1,170 milliard $. Il s'agit d'une hausse de 150 millions $ par rapport aux crédits actuels.

Une fois ce niveau rétabli, ce montant devrait être indexé annuellement en fonction de l'IPC, pour une période de cinq ans.

Par la suite, le rapport suggère d'instaurer une subvention annuelle de 35 millions $ pour une durée de cinq ans, en sus des crédits de base, afin de renforcer la programmation locale des stations de radio et de télévision situées hors des grands centres urbains.

De même, l'auteur du rapport propose de convertir le pouvoir d'emprunt à court terme de 220 millions $ de Radio-Canada en marge de crédit à long terme d'environ 300 millions $, pour que le diffuseur puisse déployer des initiatives multiplateformes et accroître sa présence dans l'univers de la télévision spécialisée.

Enfin, il propose que le gouvernement exige du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, par décret, qu'il s'assure que les services spécialisés de Radio-Canada (RDI, ARTV, Explora) soient accessibles à tous les Canadiens.

M. Fournier et Mme Meilleur présenteront les recommandations du rapport lundi prochain aux caucus néo-démocrate et libéral à Ottawa. Le caucus conservateur n'était apparemment pas disponible pour la rencontre.

«Ils feront les choix qu'ils voudront, mais on veut faire de cette question un enjeu électoral. C'est important pour la francophonie du Québec, c'est important pour la francophonie de l'Ontario, c'est important pour la francophonie du Canada et c'est dans la loi fédérale», a dit M. Fournier.