Les Canadiens déçus de ne pas avoir pu mettre la main sur un exemplaire du nouveau Charlie Hebdo dans les magasins, vendredi, auront bientôt une nouvelle occasion d'acheter l'hebdomadaire satirique français.

Alors qu'environ 1500 exemplaires du journal devaient être disponibles dans 135 magasins canadiens dans les jours à venir, le directeur national des ventes pour le distributeur canadien LMPI (La Maison de la presse internationale) a indiqué vendredi qu'une deuxième commande avait été placée pour 5000 exemplaires additionnels.

Louis-Philip Vermeersch a affirmé à La Presse Canadienne que le distributeur espérait obtenir ces exemplaires «tôt la semaine prochaine», soulignant qu'en temps normal, il y avait seulement 100 exemplaires de l'hebdomadaire envoyés au Canada.

La plupart des exemplaires additionnels - 75 pour cent - seront distribués au Québec. La vaste majorité des premiers exemplaires avaient été livrés au Québec, mais quelques-uns devaient aussi être disponibles en Colombie-Britannique, en Alberta, en Ontario, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse.

Vendredi au centre-ville de Montréal, une centaine de personnes avaient attendu à l'extérieur d'une succursale de la Maison de la presse internationale, déçues de constater que seulement quelques exemplaires du nouveau Charlie Hebdo avaient été livrés.

Le magasin devait recevoir 40 exemplaires du journal, mais n'en avait que cinq à distribuer en début de journée.

Un préposé du magasin a indiqué à La Presse Canadienne qu'il devait garder les exemplaires «pour ses patrons». Quelques heures plus tard, l'employé, Sorey Chum, a révélé à La Presse Canadienne que le magasin avait trouvé 20 exemplaires additionnels.

Certaines des personnes qui avaient fait la file ont exprimé leur frustration devant la rareté de la publication.

«Je suis ici depuis sept heures ce matin et il est 10 h 30. Ça vient de me coûter 10 $ de stationnement. On nous disait qu'il y avait 40 copies, moi j'étais dans les 40 premières personnes (...) et là on nous dit qu'on a reçu seulement cinq copies. Alors je suis très déçue», déplorait Nicole Désormeaux, avant que le magasin ne découvre 20 numéros supplémentaires.

«Je ne sais pas quoi dire. (...) Je rentre chez moi.»

Mme Désormeaux souhaitait obtenir son exemplaire parce qu'il s'agit d'«une page d'histoire».

Le distributeur canadien du journal avait prévenu qu'il n'y aurait pas suffisamment d'exemplaires disponibles pour répondre à la demande au pays. Certains commerces ont indiqué que leurs rares exemplaires avaient déjà été réservés.

Dans une succursale montréalaise du libraire Renaud-Bray, où les demandes de réservation ont explosé après que les médias ont fait savoir que les exemplaires seraient difficiles à trouver, on a cessé de prendre les réservations alors que la liste comptait plus de 560 noms. Le magasin a finalement obtenu 70 exemplaires, un nombre beaucoup plus élevé que ce qu'il tient généralement sur ses tablettes.

«Nous recevions au magasin toutes les semaines quatre exemplaires de l'hebdomadaire, et nous en vendions (...) toutes les semaines au moins un parce que nous avions un bon client qui l'achetait toutes les semaines, et parfois deux, parfois trois, parfois quatre», a raconté un employé du Renaud-Bray, Stéphane Gélinas.

Jacqueline Gaston fait partie des heureux qui ont pu mettre la main sur le précieux numéro, qu'elle avait commandé au lendemain de la tuerie. Celle qui dit avoir «vécu avec Charlie Hebdo et (son prédécesseur) Hara Kiri» s'est sentie réconfortée par la popularité nouvelle du journal satirique.

«C'est un petit signe de courage, ça console», a-t-elle confié.

Charlie Hebdo offre son édition en format numérique sur ses applications pour iPhone et téléphones Android. Le numéro est offert à 3,49 $ dans la boutique d'applications d'Apple et à 4,24 $ sur Google Play.

Le numéro, qui est épuisé en France, est le premier produit par l'équipe du journal depuis que deux islamistes ont ouvert le feu dans les bureaux parisiens de la rédaction, tuant 12 personnes.

La une du plus récent numéro montre une caricature du prophète Mahomet, pleurant et tenant une affiche sur laquelle on peut lire: «Je suis Charlie». En haut de l'image est écrit «Tout est pardonné».

Certains musulmans, qui affirment que leur religion interdit les représentations de Mahomet, ont réagi avec colère à la nouvelle une. Au Niger, notamment, quatre personnes ont perdu la vie vendredi lors d'une violente manifestation contre Charlie Hebdo.

Un leader de la branche d'Al-Qaïda au Yémen a revendiqué l'attaque contre Charlie Hebdo, affirmant dans une vidéo que les meurtres étaient un geste de «vengeance pour le prophète». Des agents du renseignement français et américain croient cependant que les attaques ont été inspirées par Al-Qaïda, sans toutefois être supervisées par le groupe.