À l'image d'une Marylin Monroe ou d'un Alain Delon, ressuscités ou rajeunis par la publicité, la nostalgie semble faire recette en temps de crise, y compris dans la presse people, où le nouvel entrant Rétro fait revivre l'actualité des stars du passé.

Cet été dans les kiosques, sa couverture en noir et blanc risque de détonner. Au milieu des photos aux couleurs étincelantes des autres magazines people, Alain Delon (jeune) y embrasse Dalida en affichant leur «passion secrète», comme si leur relation venait d'être découverte, alors qu'elle date de... 1963.

Si les rubriques «il était une fois», «retour sur» ou «le fabuleux destin de» meublent les pages des magazines et des quotidiens, en particulier au coeur d'une actualité estivale peu fournie, Rétro est la première publication à adopter aussi ouvertement la nostalgie comme ligne éditoriale.

«Les grandes histoires d'amour sont intemporelles, c'est tout à fait le ressort de la presse people qui utilise la nostalgie pour les anniversaires ou les morts. Mais en dehors de ça, on n'y voit jamais des photos en noir et blanc!», souligne un journaliste de la presse people, qui souhaite rester anonyme.

Outre Alain Delon et Dalida, le duo De Funès-Bourvil, Claude François, le commandant Cousteau ou James Dean peuplent l'essentiel du sommaire de Rétro, qui établit un lien avec une actualité plus récente de ces stars décédées ou vieillissantes: dates anniversaire, sortie d'un film ou d'une compilation.

«À chaque fois, on fait le lien avec l'actualité présente, comme avec le sujet sur le commandant Cousteau où on parle du film à venir avec Romain Duris dans le rôle», explique à l'AFP Valérie Meyer, l'éditrice de ce magazine qui s'adresse aux lecteurs de «40/45 ans et plus».

Pour ne pas être totalement dans le passé, le magazine aborde des sujets plus actuels, comme l'été à Saint-Tropez ou le futur héritier monégasque, mais c'est pour mieux parler de la dynastie des Grimaldi ou de l'âme de la station balnéaire de la jet-set.

«La nostalgie, ça rassure»

Lancé par Bauer Media, groupe allemand de presse, radio et télévision présent dans 16 pays et qui édite déjà en France les magazines Maxi, Maxi Cuisine et Bistro, le premier numéro de Rétro est un ballon d'essai.

Le groupe allemand de 11 000 salariés se donne jusqu'à septembre pour voir si le concept prend et pérenniser ou non le titre.

«Ils ne prennent aucun risque. Ça ne coûte rien à faire et comme il y a un côté consensuel, ils ne se feront pas attaquer en justice», estime Virginie Spies, maître de conférence à l'Université d'Avignon, spécialiste des médias, à propos de ce titre, qui emploie quatre ou cinq journalistes rédacteurs.

Rétro, qui existe déjà depuis 2013 en République Tchèque, se veut «positif et bienveillant» envers les célébrités et ne cherche surtout pas à fouiller leur passé mais, au contraire, à se «souvenir des grands moments qui ont bercé notre enfance», confirme Valérie Meyer. Car, «la nostalgie, ça rassure en temps de crise».

Les publicitaires, qui font renaître les stars du passé pour mieux vendre leurs produits, l'ont bien compris.

Avec Marylin, James Dean et d'autres vedettes dont les destins tragiques ont marqué plusieurs générations, les annonceurs misent sur «une nostalgie pure avec le retour à une époque fantasmée pour vanter des produits atemporels; et en les insérant dans des scénarios du présent, les marques montrent combien elles traversent le temps», expliquait récemment à l'AFP Jean-Philippe Danglade, professeur de marketing à l'école Kedge Business de Marseille.

Armé de ce crédo, Rétro va tenter de bousculer le marché de la presse people, qui compte déjà une dizaine de titres, de Closer à Voici, en passant par France Dimanche ou Ici Paris.

«C'est un secteur qui se porte encore bien même s'ils sont en baisse comme tout le monde», explique l'historien de la presse Patrick Eveno.