Le patron du groupe birman Eleven Media, Than Htut Aung, a reçu lundi la prestigieuse Plume d'or de la Liberté de l'Association mondiale des journaux et éditeurs de médias d'information (Wan-Ifra), pour avoir bravé les restrictions à la liberté d'expression.

«En construisant ses journaux à partir de rien, il a fait face à une forte pression du gouvernement et au stylo toujours présent des censeurs», a commenté Erik Bjerager, président du Forum mondial des éditeurs en présentant la récompense.

Après un demi-siècle de dictature militaire, la junte s'est autodissoute en mars 2011 et a transmis ses pouvoirs à un gouvernement d'anciens militaires qui a depuis multiplié les réformes. La censure a été abolie, des journalistes emprisonnés ont été libérés et les quotidiens privés ont fait leurs débuts en avril. Des progrès décrits par Reporters sans frontières (RSF) comme une «révolution de papier», même si le pays figure encore au 151e rang sur 179 à son classement 2013 de la liberté de la presse.

Than Htut Aung a d'ailleurs émis des réserves sur ses réformes. «Je comprends qu'après 50 années de dictature, la route vers la démocratie puisse ne pas se faire en douceur. Nous vivons toujours sous pression et dans la peur. Nous devons résister. Nous devons nous battre», a-t-il déclaré.

Au départ journal sportif, le groupe Eleven Media Group, créé il y 13 ans, emploie aujourd'hui 450 personnes dont 140 reporters, et a lancé un quotidien le mois dernier. En 2010, l'une de ses publications avait été suspendue pendant deux semaines pour avoir caché dans un titre sur une rencontre de football l'annonce de la libération de résidence surveillée de l'opposante Aung San Suu Kyi.

Les nouvelles libertés mettent pourtant au défi les journalistes birmans eux mêmes. RSF a ainsi évoqué récemment une couverture «parfois biaisée» des violences religieuses meurtrières qui secouent le pays majoritairement bouddhiste depuis un an, citant notamment «la quasi absence d'informations fiables concernant les violences».