Il n'y a pas si longtemps, quand on voulait s'inscrire dans la postérité, on essayait de réaliser quelque chose de grand, d'extraordinaire: créer une oeuvre d'art - un livre, une peinture, un air de musique - par exemple. On pouvait aussi tenter de changer le monde en participant à une oeuvre humanitaire, en faisant du bénévolat ou de la politique. C'était à l'époque où notre vie se déroulait en majorité sur le plancher des vaches, dans un univers concret.

Mais comment assurer notre pérennité dans un monde virtuel où l'on peut supprimer les traces que nous avons laissées sur des disques durs tout au long de notre vie? Comment ériger un monument dans le cyberespace? Qui se souviendra de nos bons tweets, de nos superbes clichés sur Instagram ou de nos mots d'esprit sur Facebook?

À l'heure actuelle, on évalue qu'une personne de 65 ans laisse l'équivalent de 12% de sa vie dans l'environnement numérique. Cette proportion grimpe à 56% pour une personne de 45 ans, à 72% pour une personne de 25 ans et à 86% (!) pour un adolescent.

Ce n'est donc pas une surprise si, de plus en plus, on voit apparaître des outils qui perpétuent notre présence dans les réseaux sociaux: il y a bien sûr Facebook qui permet depuis quelque temps déjà d'ériger une page commémorative en l'honneur d'un disparu. Il faut toutefois qu'un proche ait signalé le décès de l'abonné. Il y a également l'application Facebook Evertalk qui avise famille et amis du décès de la personne et qui leur permet de télécharger et d'échanger des photos, rédiger un message et même faire un don sans jamais quitter la page du disparu.

Le site 1000memories est un autre lieu où famille et amis peuvent partager des photos. Quant à After Me, on l'utilise pour laisser un testament virtuel aux proches et aux descendants. Contrairement aux sites «hommage», c'est vous qui décidez du contenu et de ceux et celles qui y auront accès.

Parallèlement à ces sites qui honorent la mémoire des personnes décédées, on voit désormais apparaître des sites qui donnent pratiquement l'illusion que la personne disparue demeure parmi nous.

Depuis quelques semaines, le compte The Tweet Hereafter publie par exemple les derniers tweets à vie d'individus. On peut d'ailleurs y lire celui de Reeva Steenkamp, la fiancée d'Oscar Pistorius, publié la veille de sa mort.

En entrevue, les concepteurs du site assurent que leur démarche est très respectueuse. Jusqu'ici, ils ont publié une cinquantaine de tweets dont la lecture est parfois troublante. Un exemple: le 19 janvier, Mindy McCready écrivait: («Les choses ont été folles, mais je suis encore là» («Things have been hectic. But I'm still here...») Elle est morte le 17 février.

Le compte LivesOn, qui doit être lancé le mois prochain, est un peu différent. À l'aide d'algorithmes, il étudie votre style et continue de publier des tweets en votre nom après votre mort. Le slogan de l'entreprise: «Quand votre coeur arrêtera de battre, vous continuerez à twitter.» («When your heart stops beating, you'll keep tweeting.») laisse songeur.

Sur Dead social, dont on parlait à la conférence SXSW l'an dernier, on peut préprogrammer des tweets qui seront publiés après notre mort sur Twitter et Facebook. Il ne s'agit pas d'une blague de mauvais goût - le concepteur a même consulté des spécialistes en soins palliatifs en élaborant son site - mais bien une façon d'assurer une présence, dit-on.

Quant à If I die, c'est une application Facebook qui permet d'envoyer un message après notre mort (la publicité d'If I die, qu'on peut voir sur le site et livrée sur un ton humoristique, laisse perplexe). Est-ce la nouvelle façon de dire au revoir? Le point final à une vie qui se déroule de plus en plus sur l'internet? Ou une manifestation - une de plus - de notre incapacité à accepter qu'il y a une fin et qu'une fois morts, nous n'aurons plus voix au chapitre?

Pour ne pas complètement disparaître

www.everta.lk

1000memories.com

https://www.after-me.com/

The Tweet Hereafter (@TweetAfter)

@_LivesOn

https://deadsoci.al/

https://ifidie.net/