Les lecteurs qui ont apprécié La trilogie berlinoise de Philip Kerr devraient lire Deux dans Berlin (Richard Birkefeld et Göran Hachmeister), un excellent polar historique ayant pour toile de fond la description hallucinante, apocalyptique, de la capitale allemande sous les bombes durant l'hiver de 1944.

Au coeur de l'intrigue, une chasse à l'homme inusitée: Kalterer, un officier SS impliqué dans les nettoyages ethniques à l'Est, recyclé en policier, pourchasse Ruprecht Haas, un petit épicier condamné pour haute trahison, évadé de Buchenwald, et bien décidé à supprimer tous ceux qui l'ont dénoncé aux autorités et qui ont provoqué la mort de sa femme et de son enfant.

La différence avec les polars de Kerr, c'est l'absence d'humour, les auteurs ayant opté pour une approche très réaliste.

Kalterer a beau être le «héros» du récit, c'est un type assez répugnant, que sa conscience taraude, certes, mais qui ne pense qu'à sauver sa peau, alors que sa proie, pathétique à souhait, devient une machine qui tue sans discernement des voisins et d'anciens amis, sans se douter un seul instant que les apparences peuvent être trompeuses.

En cela, le dénouement de cette intrigue, qui réserve quelques surprises, est particulièrement réussi. En plus d'être un bon polar, Deux dans Berlin est une magistrale leçon d'histoire. Le roman a d'ailleurs remporté deux des plus prestigieux prix du roman policier en Allemagne. Passionnant et très noir!

Dans Film noir à Odessa de William Ryan, nous retrouvons l'inspecteur Korolev (Le royaume des Voleurs).

Il est envoyé à Odessa, en Ukraine, pour enquêter sur le suicide d'une jeune femme un peu trop liée à un haut dirigeant du Parti. Il découvre que la victime a été assassinée après avoir absorbé de la morphine.

L'inspecteur se retrouve en terrain miné quand Kolya, chef de la mafia des Voleurs, lui révèle que cette Maria Lenskaïa était mêlée à un trafic d'armes avec les nazis.

Avec en toile de fond une Ukraine ravagée par les politiques de Staline, où grouillent les factions antirévolutionnaires, ce deuxième polar historique de Ryan nous entraîne au coeur d'une intrigue riche en suspense avec un personnage vulnérable et sympathique chargé d'une mission quasi impossible pour laquelle il va recevoir l'aide de Nadejda Slivka, une jeune inspectrice qui n'a pas froid aux yeux et que l'on espère retrouver dans les futurs polars de cette série fort remarquable.

Autant j'ai détesté le médiocre Les neuf dragons, de Michael Connelly, autant j'ai apprécié son Volte-face, même si le scénario est sans surprise. C'est un thriller judiciaire très classique avec comme protagoniste l'avocat de la défense Mickey Haller qui, exceptionnellement, change de camp.

Il devient procureur et doit persuader un jury de condamner à nouveau Richard Jessup, meurtrier d'une fillette, qu'un test d'ADN semble innocenter, et cela après qu'il eut passé 24 ans en prison.

Pour étayer sa preuve, Haller fait appel à Harry Bosch, égal à lui-même, et à son ex-femme Maggie. Toute l'équipe est persuadée de la culpabilité de Jessup. Encore faut-il la prouver...

Pendant que Bosch fait des découvertes troublantes à propos du prévenu, Halley entame un véritable duel de procédures avec son avocat, reconnu pour ses méthodes peu orthodoxes.

Scènes de prétoire, effets de toge, coups de théâtre, témoignages dramatiques et poignants, le roman est rythmé par les étapes d'un procès riche en surprises et en revirements.

La narration est fluide, l'intérêt constant, avec un bon suspense. Seul bémol: le dénouement, un peu irritant, présente quelques zones d'ombre. Ce n'est pas le meilleur Connelly, mais c'est une histoire solide, sans extravagance, et qui nous tient en haleine.

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Deux dans Berlin. Birkefeld et Hachmeister. Le Masque, 430 pages, 34,95$.

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Film noir à Odessa. William Ryan. Flammarion-Québec, 334 pages, 29,95$.

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Volte-face. Michael Connelly. Calmann-Lévy, 434 pages, 32,95$.