Berlin, 1936. Les nazis d'Adolf Hitler sont au pouvoir. Après 10 ans passés dans la Kripo (police criminelle), Bernie Gunther est devenu détective privé. Il est engagé par Hermann Six, un riche industriel, dont la fille et le gendre ont été assassinés dans leur maison incendiée. Des bijoux de grande valeur et différents papiers compromettants ont été dérobés. Six voudrait trouver le meurtrier et récupérer les biens volés.

C'est ainsi que débute L'été de cristal, premier volet de la formidable Trilogie berlinoise (devenue une tétralogie) que les éditions du Masque ont eu l'excellente idée de rééditer en un seul volume, en même temps que le quatrième roman de cette magistrale saga historique conçue en 1989.

 

Après avoir éclairci l'épineuse affaire du couple assassiné, Gunther réapparaît deux ans plus tard dans La pâle figure, alors que la menace de guerre se précise en Europe. Il est convoqué par le sinistre et tout-puissant Heydrich (un rival de Heinrich Himmler, chef de la Gestapo) qui lui fait une offre qu'il ne peut refuser: réintégrer les rangs de la police avec le titre de commissaire pour traquer un tueur en série qui exécute de jeunes Allemandes selon un rituel typique qui désignerait un coupable juif.

Fin limier, Gunther ne se laisse pas abuser par les apparences et découvre un complot encore plus sinistre. Un requiem allemand se déroule en 1947. La guerre est terminée, Berlin est en ruine. La ville est occupée par les Alliés et la chasse aux criminels de guerre bat son plein. Redevenu détective privé, Gunther se voit offrir 5000$ pour venir en aide à Becker, un ancien collègue qui est accusé d'avoir assassiné un capitaine américain. Malgré des preuves flagrantes, il clame son innocence.

Une fois de plus, Gunther met les pieds dans un nid de guêpes, une affaire extrêmement dangereuse qui a d'importantes ramifications politiques.

La suite, 20 ans plus tard

Publié près de 20 après cette trilogie, La mort, entre autres est la suite chronologique des récits précédents. L'action se transpose en 1949, alors que Gunther traverse une passe difficile: sa femme se meurt et son passé de SS est en train de le rattraper. Quand une cliente affriolante lui demande de retrouver son mari, un nazi en fuite, il ignore qu'une fois de plus sa vie va basculer dans le cauchemar. À cause de sa ressemblance physique singulière avec un médecin qui pratiquait des expériences monstrueuses dans les camps, il est plongé au coeur d'un complot machiavélique, avec comme seules portes de sortie une exécution sommaire ou l'exil en Amérique du Sud.

Pour vous dire à quel point j'ai apprécié ces polars historiques, je vais me permettre une affirmation audacieuse: comparé à ces récits bouleversants, Millénium m'apparaît aujourd'hui comme du fast-food pour midinettes! Étant un passionné de tout ce qui touche à la Seconde Guerre mondiale, j'admire la manière ingénieuse dont Kerr, à travers des intrigues policières palpitantes, reconstitue une partie (souvent inconnue) de l'histoire de l'Allemagne sous le Troisième Reich en convoquant à la barre des témoins les pires acteurs (Eichmann, Mengele, Streicher, Himmler, Heydrich et cie) de cet affreux psychodrame qui s'est soldé par la mort de millions de personnes.

Bernie Gunther est un détective privé dans la grande tradition des durs à cuire du roman noir. Grand séducteur, vétéran de la Grande Guerre dont les boucheries l'ont rendu cynique, il est farouchement anti-nazi, ce qui lui vaudra bien des ennuis, dont un séjour de quelques semaines dans un camp de concentration. Son sens de l'humour à toute épreuve et ses répliques cinglantes donnent à cette saga historique plutôt noire une touche de fantaisie tout à fait bienvenue dans ce contexte ultra-violent. Une expérience de lecture fascinante, unique et instructive. À lire dans l'ordre chronologique, de préférence.

La trilogie berlinoise

Philip Kerr Le masque, 838 pages, 39,95$

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La mort, entre autres

Philip Kerr Le masque, 406 pages, 29,95$

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