Revoilà Jean-Paul Dubois sur ses terres de prédilection: un narrateur masculin, entre deux âges, entre deux femmes, entre deux vies. Les accommodements raisonnables se déploient entre Toulouse - l'écrivain a toujours la Ville rose au coeur - et Hollywood, le temps d'une année.

Paul Stern est scénariste. Marié à Anna, son premier amour, père de trois enfants, aujourd'hui adultes, Paul fait face à la dépression de sa femme et à la désintégration, lente mais presque inéluctable, de leur vie de couple. Appelé par les États-Unis, il devient le «script doctor» d'un film pour le compte d'un producteur doué pour les bonnes affaires.

 

Son départ pour Hollywood coïncide avec l'internement d'Anna. Son père, pendant ce temps (mais que seraient les héros de Dubois sans leurs figures paternelles?), vit pleinement une crise d'adolescence déclenchée par le décès soudain de son «meilleur ennemi», son propre frère.

Les accommodements raisonnables est le récit, mois après mois, de l'année particulière d'un homme, qui, loin de sa famille, plongé dans un milieu fantôme (Hollywood en pleine grève des scénaristes), tombe dans les bras de Selma, le sosie d'Anna 30 ans plus tôt.

Et le Québec là-dedans? Contrairement à Si ce livre pouvait me rapprocher de toi, rien dans Les accommodements raisonnables ne fait écho au Québec, à une célèbre commission ou à un célèbre village, farouche opposant à la lapidation des femmes. Les accommodements, ici, sont ceux que l'on fait sans le dire, un arrangement entre soi, intime, privé avec lequel les couples se débrouillent tant bien que mal.

Le ton des Accommodements raisonnables ne déstabilisera pas les fidèles de Dubois. Comme dans Kennedy et moi ou Une vie française, Paul est un héros lucide sur ses défauts, parfois désabusé, mais qui ne tourne jamais tout à fait le dos à ses convictions.

La plume de l'écrivain se déploie sur un terrain familier puisqu'une bonne partie du roman se déroule aux États-Unis, un pays que Jean-Paul Dubois, ancien journaliste du Nouvel Observateur, connaît dans son gigantisme comme dans ses folies les plus quotidiennes. On reste, comme dans L'Amérique m'inquiète, dans une critique raisonnée de nos fascinants voisins.

Les accommodements raisonnables est un bon cru Dubois. Bon, parce que l'on s'y sent en terrain familier, et que Dubois sait toujours comment attacher son lecteur aux troubles de ses héros imparfaits. Mais il manque à ces accommodements un petit quelque chose qui le classerait dans les grands crus; un peu de profondeur à ses personnages secondaires, peut-être.

Les accommodements raisonnables

Jean-Paul Dubois Éditions de l'Olivier, 260 pages, 29.95$ ***