«Je vais te faire une cérémonie», écrit Hélène Monette en ouverture de l'ode magnifique à sa soeur aînée disparue en 2005, Thérèse pour joie et orchestre, 12e livre douloureux et pourtant chatoyant, d'une maîtrise étonnante dans le tumulte du chagrin.

Monette y cumule les rappels effilochés, celui d'une complicité autour d'un thé, d'une balançoire de l'enfance qui s'ébauche en pastel avant de s'effondrer comme un souvenir, celui de discussions partagées «des étoiles cabriolent dans un cortège/de phrases émerveillées/nous sommes lancées», le rappel de ce qui les distingue ou unit, «apôtres dépareillées du même amour intrigué», «si tu me laisses un jour, tu sais bien/le gris du monde, de quoi il retourne/combien il fonce, abruti»

 La poète ramasse à s'en écorcher les mains des filaments de lumière autour de la fosse comme un bouquet de ballons, traduisant dans un prélude, puis dans une série de fantaisies ou encore dans une pastorale toute champêtre son amour en dentelle pour sa soeur, faisant repousser les arbres sur les territoires piétinés de l'enfance et gardant bien à l'abri les secrets sous des rubans. Puis, viennent, sombres, un oratorio et des nocturnes, où les lanternes de Monette s'éteignent sous la bourrasque, «bien que dorénavant/il me faille chercher un mot plus noir qu'obscurité». Viennent les «secondes crispées de l'agonie» et la solitude vertigineuse de la soeur qui reste au sol. Avec l'ange, s'est envolée la lumière et dans cette soudaine noirceur, Monette inscrit «personne n'est-ce pas personne ne viendra».

 

________________________

Thérèse pour joie et orchestre

Hélène Monette

Éditions Boréal

160 pages, 19,95$

*****