S'il y a une chose que l'on ressent en compagnie de la romancière Patricia MacDonald, c'est qu'elle ne raconte pas d'histoires ailleurs que dans ses livres. Voici donc toute la vérité au sujet du Poids des mensonges.

Patricia MacDonald aborde son métier de romancière à bras le corps, sans se torturer l'âme. Après un revers dans sa carrière de journaliste, elle a commencé à écrire des romans policiers - parce que c'est ce qu'elle aimait lire - et en publie depuis sur une base régulière. Le poids des mensonges est son 16e. « Et, oui, j'ai peur de me répéter», lâche-t-elle en riant, jointe au téléphone chez elle, à Cape May, dans cet excellent français qu'elle a appris par respect pour ses lectrices, plus nombreuses dans la francophonie qu'aux États-Unis.

Une réalité qu'elle explique de deux façons.

«Ne pas avoir de personnage récurrent nuit, dans ce pays. Mon agent m'a supplié, au début, d'en avoir un, parce que cela aurait permis de signer un contrat de trois livres, mais je n'ai pas voulu. Il y a là un piège séduisant, mais qui reste un piège: le lecteur demande encore et toujours plus d'incursions dans ce même univers, alors que l'auteur s'ennuie de plus en plus en compagnie de ses personnages.» Et si Patricia MacDonald considère ce qu'elle fait comme un travail, elle n'a pas envie de s'ennuyer au boulot!

Et puis, il y a le fait qu'au départ, elle n'a pas été capable de produire le roman annuel auquel s'attendent les fans de tel ou tel inspecteur. «J'ai commencé assez lentement parce qu'au début de ma carrière, je ne savais pas comment écrire un polar. Il s'est écoulé deux ou trois ans entre la publication de mes premiers livres. Ça n'allait pas assez vite pour certains.» Mais quand la publication de son oeuvre a débuté en France, elle avait déjà plusieurs bouquins à son actif - qui sont sortis les uns après les autres, espacés d'un an. Le rythme «magique».

«Je crois aussi, pour consommer beaucoup de cinéma français, que les francophones aiment les récits du quotidien, plus que les Américains», poursuit celle qui a justement fait de ce quotidien la base de ses thrillers. Ce quotidien qui dérape soudain. La disparition d'un enfant, par exemple - «Parce que je sais que c'est quelque chose qui va provoquer des émotions immédiates chez les lecteurs, et c'est ce que je recherche.»

Ce filon, Patricia MacDonald l'a donc exploité à plusieurs reprises dans ses romans et elle le creuse de nouveau dans Le poids des mensonges. Mariée à Noah, Catlin est la belle-mère du petit Georgie, dont la maman est morte quelques années plus tôt. C'est le bonheur dans cette famille jusqu'au jour où le gamin, que Catlin a conduit à l'école, disparaît. Les soupçons se portent bientôt sur celle qui, de maman, devient belle-mère.

Et c'est là le premier intérêt de Patricia MacDonald dans cette intrigue: «De nos jours, les beaux-pères et belles-mères sont monnaie courante et ils aiment leurs «beaux-enfants» comme les leurs. Et puis, le drame survient et il arrive que les soupçons se portent sur eux. Un peu comme si l'image de la marâtre des contes de fées restait dans l'imaginaire collectif.»

L'idée du Poids des mensonges lui est venue de deux faits divers. Celui d'un garçonnet conduit à l'école par sa belle-mère et qui a disparu. «C'était il y a deux ans, dans l'État de Washington, et il n'a pas encore été retrouvé.» Et celui de cette jeune femme retrouvée il y a quatre ans en Californie après avoir été séquestrée pendant 18 ans par un homme de qui elle a eu deux enfants. «Elle avait 11 ans au moment de l'enlèvement, qui s'est produit sous les yeux de son beau-père. Celui-ci a tout raconté à la police, mais personne ne l'a cru et tout le monde a pensé qu'il était coupable. Il a tout perdu, sa famille, son travail, ses amis.»

Là, dans l'exploration du drame du «beau-parent» soupçonné, se trouvait donc l'angle de Patricia MacDonald dans cette autre page d'un quotidien qui bascule: «Je ne suis pas superstitieuse, mais parfois, je me dis qu'un jour, je vais payer pour tous ces malheurs infligés à ces pauvres gens», rigole-t-elle au bout du fil... pas vraiment inquiète. Après tout, elle ne fait que son boulot!

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Le poids des mensonges. Patricia MacDonald. Albin Michel, 336 pages.