À 89 ans et avec quelque 200 films au compteur, Michel Piccoli est connu de tout francophone un tant soit peu intéressé par le cinéma. Il a été dirigé par Godard (Le mépris), Buñuel (Belle de jour), Ferreri (La Grande Bouffe), Malle (Milou en mai) et Sautet (Max et les ferrailleurs), pour ne nommer que les metteurs en scène qui viennent spontanément à l'esprit quand on pense à lui.

Mais au fond, on connaît si peu cet homme à la voix de velours, séducteur impénitent et fragile, au cinéma du moins. Dans ce court essai à quatre mains, Gilles Jacob lui pose quelques grandes questions sur sa vie, le métier d'acteur, la vieillesse et l'écriture. Piccoli prend la plume et répond avec détails et pudeur. On apprend ainsi qu'il est fils unique de musiciens, qu'il a passé son enfance à dormir sur le divan du salon, faute d'espace pour avoir sa chambre.

Mauvais élève, il s'est pourtant totalement investi pour devenir un bon acteur, accumulant les rôles, d'abord petits, sur les planches avant de percer au cinéma dans Le mépris de Jean-Luc Godard, oeuvre paradoxalement flamboyante et austère dans laquelle Piccoli a pour partenaire Brigitte Bardot, de qui il loue la discipline au travail. Il tournera aussi avec Catherine Deneuve et Romy Schneider (au moins cinq fois), à qui il a voué de la tendresse mais pas de l'amour, insiste-t-il.

Piccoli a été riche, a passé ses brevets de pilote, lancé sa maison de production. Mais il a aussi été ruiné, peut-être un peu distrait dans ses intérêts, mais aussi déçu par quelques amitiés. Il s'étend au minimum sur sa vie amoureuse, déplorant tout juste le fait qu'il a perdu contact avec sa fille née d'un premier mariage et que sa compagne Juliette Gréco l'a un jour chassé de chez elle pour faire place à son pianiste.

Il n'est pas tendre non plus avec Yves Montand, trop épris de son propre personnage peut-être, alors qu'il admire Gérard Depardieu, certes un peu fou, mais formidable acteur, et Marco Ferreri, un réalisateur qui l'a poussé à sortir de sa zone de confort à quelques reprises.

On aurait lu encore beaucoup de pages de ce livre trop court qui nous laisse sur notre faim.

J'ai vécu dans mes rêves, Michel Piccoli avec Gilles Jacob. Grasset, 139 pages

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GRASSET

J’ai vécu dans mes rêves, de Michel Piccoli, avec Gilles Jacob