Jean Bédard poursuit son Cycle des chants de la terre avec un nouveau roman enraciné dans le Grand Nord, un an après Le chant de la terre innue. Inspiré de l'histoire du frère morave Jens Haven, au XVIIIe siècle, et de Mikak, Inuite du Labrador parmi les premières à se rendre en Europe, le récit retrace avec précision et intensité une part fondamentale de la colonisation du continent.

Désormais vieille et seule, Mikak, qui a appris l'anglais et l'allemand avec les missionnaires, raconte sa vie à un vieux corbeau pour «replacer l'horizon sur sa ligne».

Elle se rappelle cet homme aux cheveux d'ocre venu vivre avec les siens et qui revient avec ses frères pour «évangéliser les sauvages» et les préparer au «commerce civilisé ».

La cohabitation transforme les Inuits qui ne chassent plus sur leurs territoires d'hiver, se sédentarisent et abandonnent la polygamie pour se faire baptiser.

Traversée éreintante d'une époque aussi ingrate que ces terres où se joue ce pan de l'histoire du Grand Nord, ce roman sur la perte de l'identité incarne avec force le déchirement entre deux mondes qui finit par transformer en réprouvés tous ceux qui enfreignent les limites des traditions ancestrales.

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Le chant de la terre blanche. Jean Bédard. VLB éditeur, 256 pages.