C'est en lisant ce sixième roman de la Française Joy Sorman que cela, soudain, nous frappe: Sorman n'est pas une romancière, mais bien une fabuliste, et une exceptionnelle fabuliste, qui plus est.

La plus récente et magnifique «fable» de son cru prend, pour allégorie, un être mi-ours, mi-humain, né de «l'attirance réciproque entre les ours et les jeunes filles» (!), pour raconter la dérive des relations entre les animaux et les humains.

Et illustrer tout ce que nous avons inventé pour marquer notre «supériorité»: le zoo, le cirque, le dressage... Même l'arche de Noé est évoquée, mais a contrario, dans une des scènes les plus saisissantes de ce court roman écrit avec un souffle exceptionnel.

Comme dans les fables les plus fameuses, le temps s'étire, l'espace se dilate, on ne sait ni où ni quand tout cela se passe. Mais on sait qu'on est dans un roman écrit avec un talent fou, aussi empli de sensualité que d'informations précises sur les ursidés - une des marques de commerce de Sorman, cet amour du terme technique juste.

Avec, au final, une «morale» qui rappelle simplement l'amoralité des êtres humains. Et l'humanité désespérée des animaux.

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La peau de l'ours. Joy Sorman. Gallimard. 160 pages.