C'est la fin d'un monde que sonnent les quatre nouvelles de Laurent Gaudé: «Les statues seront mises à bas, les temples brûlés, la langue que nous parlons s'oubliera», constate le chef romain Lucius en rentrant à Rome, mourant, alors que les Barbares sont sur le point de mettre fin à la puissance de l'Empire.

Le décor italien sert ici de toile de fond, âme du monde que les hommes oublient d'écouter pour apprendre de leurs fautes. Parvenues à un moment charnière de leur vie, ces voix sont celles d'individus aux prises avec un destin qu'ils savent minuscule par rapport à l'immensité de l'Histoire. Des confins de l'Empire romain à la Sicile où la mafia perpétue la violence et la mort, en passant par les tranchées de la Grande Guerre, en France, les thèmes, les tons et les époques ne disent au fond que «quelque chose est ici qui nous traverse de loin, que nous avons oublié mais qui est juste et harmonieux». Ce fil conducteur offre un souffle dramatique et tragique aux histoires, mais on reste sur l'impression d'un exercice de style bien accompli: hormis le monologue de Lucius, saisissant, on aurait aimé se sentir davantage emporté par ces voix d'outre-tombe.

Les oliviers du Négus, de Laurent Gaudé. Éd. Actes Sud, 140 pages