«Les adultes ont la manie de réécrire constamment leur enfance, parce qu'ils ont besoin, sans s'en rendre compte, d'un refuge imaginaire pour fuir le présent.»

Avec sa plume précise aux accents de douce mélancolie, on aura compris que François Maspero raconte cette fois-ci des souvenirs de jeunes années: les siennes en première partie, puis celles de sa fille telles qu'il s'en souvient. Il retient surtout les souvenirs qu'il puise dans le nord de la France, depuis l'avant-guerre où il joue avec son frère aîné qui mourra fusillé par l'occupant allemand, jusqu'à la guerre d'Algérie, où le père travaillait comme correspondant avant son expulsion par l'occupant, français celui-là, pour cause de non-patriotisme.

Tout le récit baigne dans les moments furtifs, les rapports entre parents et enfants, les petites légendes qui font rire les enfants, les liens entre les hommes et la nature. Bref, de toutes ces choses inutiles sans lesquelles la vie n'aurait aucun sens.

L'ensemble est narré avec retenue, pudeur, mais avec un débordement d'affection pour les personnages esquissés qui animent et colorent cette autofiction où la mer reste omniprésente. Le fil conducteur reste le narrateur, qui choisit d'écrire à la troisième personne, mais de manière si subjective qu'il nous fait pénétrer peut-être davantage dans l'immense tristesse qui découle du constat implacable qu'on ne vit qu'une fois, qu'importe que l'époque où nous échouons soit formidable ou tragique.

Des saisons au bord de la mer

François Maspero

Seuil, 172 pages. 24,95$

***1/2