Astérix connaissait Rome, mais pas l'Italie qu'il parcourra dans le prochain opus Astérix et la Transitalique, «un clin d'oeil à (Albert) Uderzo», le dessinateur historique originaire de ce pays, confie son scénariste Jean-Yves Ferri.

Lors d'un entretien avec l'AFP en marge du salon de la bande dessinée de Buenos Aires, Comicopolis, Jean-Yves Ferri évoque la sortie le mois prochain de son troisième Astérix comme scénariste et les inspirations de René Goscinny, qui a passé sa jeunesse en Argentine.

Q: Vous êtes en Argentine pour faire des repérages afin d'y situer l'action d'une prochaine aventure?

R: «Les élèves du lycée français (de Buenos Aires) m'ont posé la même question. Moi je veux bien, ce serait un beau titre, Astérix en Patagonie, mais la difficulté quand on est Gaulois, c'est d'aller aussi loin. Et de trouver un moyen de transport. Je leur ai dit: "si vous avez des idées, écrivez-moi"».

Q: A Buenos Aires, vous êtes sur les traces de Goscinny...

R: «L'Argentine, comme par hasard, c'est aussi le pays d'enfance de Goscinny. C'est marrant de voir qu'il a laissé un souvenir. On m'a montré l'effigie des indiens Patoruzu et Upa, deux personnages emblématiques d'une BD argentine des années 1930 que Goscinny avait lue certainement, étant enfant, et qui avaient dû l'influencer pour ses propres personnages».

Q: Astérix est lu en Amérique?

R: «En Amérique du sud un petit peu. Cela a toujours été des petits tirages, mais il a toujours été présent. L'Amérique du Nord, non. Les Américains ont un peu de mal à s'identifier à un petit village de Gaulois. Mais le gros lectorat c'est l'Europe. L'Allemagne est le deuxième pays à aimer Astérix après la France. Ils sont presque aussi fans que les Français».

Q: Astérix et la Transitalique, c'est une course de chars au départ de Monza?

R: «On ne peut pas raconter l'histoire, imaginez que je sois filmé (rires) et que l'éditeur le voie, je suis flambé. Ce qu'on peut dire, c'est que la Transitalique, une traversée de l'Italie, est l'occasion pour Astérix et Obélix d'aller en Italie. Ils étaient allés à Rome mais pas vraiment en Italie. En traversant l'Italie, ils croisent différents peuples car l'Italie de l'époque, c'est une mosaïque. La famille d'Uderzo est originaire de la Vénitie et il était normal de lui faire un petit clin d'oeil. Elle était d'un village proche de Venise qui s'appelle Oderzo».

Q: Il y a des nouveautés?

R: «Le caractère d'Obélix est un peu différent dans cette histoire. En tant que nouveau, j'essaie de travailler des facettes qui n'avaient pas trop été explorées. Cette fois-ci, je me suis dit, Obélix on va continuer à voir un aspect de lui qu'on n'a pas trop vu. Je me suis dit qu'un caractère comme Obélix était influençable par des choses un peu surnaturelles, un côté un peu mystique. Dans le prochain, il y a un peu de cet aspect, il revendique un peu plus sa place».

Q: Comment se conçoit un Astérix?

R: «Il a fallu construire une méthode. Goscinny et Uderzo travaillaient d'une manière. Goscinny était un écrivain plus qu'un dessinateur, il présentait à Uderzo des descriptions. Moi, je suis dessinateur. Donc plutôt que d'écrire, je fais un storyboard, j'esquisse la page avec les cases, sommairement la mise en scène, mais pas trop strictement pour ne pas coincer le dessinateur. Il y a déjà le découpage et les textes. Puis il y a des aller-retours. (Didier) Conrad le dessinateur est aux États-Unis, donc je lui envoie la page, il fait son brouillon, on discute. Quand il a tout crayonné, il transpose à l'encre. Comme on est très loin, on se voit très peu, seulement quand il vient en France. Pendant la promo d'Astérix et la Transitalique, on va passer un mois ensemble, ça va être l'occasion d'évoquer le suivant».

Q: Le nouvel album devrait être une nouvelle fois un grand succès de librairie, quel est le secret?

R: «Parce qu'on fait des bons albums (rires). C'est le mystère. Goscinny et Uderzo eux-mêmes étaient surpris. C'est dû à leur talent. Un enfant peut le lire, un grand aussi. Le dessin peut se lire au premier degré, puis le raffinement des textes de Goscinny. C'est un petit miracle cette rencontre. Il y a des excellentes séries qui n'auront jamais ce succès».