Qui de mieux que Claude Ponti, ce roi des poussins, pour lancer le serpentin d'un Salon du livre placé sur le thème de la famille? En visite au Québec, l'auteur et dessinateur adoré des petits et des grands est l'un des invités d'honneur les plus attendus de ce 32e salon qui s'est ouvert hier.

Ses livres frétillent sous l'assaut d'une multitude de poussins et charment les petits depuis près de 20 ans sans jamais que la fraîcheur s'atténue. On croirait presque que Ponti est mystérieusement entré dans la tête d'un enfant de 4 ans pour n'en plus ressortir. «Je reconnais que je suis de plain-pied avec les enfants et je ne sais pas pourquoi, affirme tout simplement l'auteur. Je remercie le ciel (qui est vide) de m'avoir fait ce cadeau. C'est peut-être parce que je suis radicalement de leur côté. Vous savez, quand je croise un bébé dans la rue, je prends une décharge. Ça me dynamise pour deux ou trois heures.»

Depuis des années, Claude Ponti contribue à la création d'une réelle littérature destinée aux jeunes enfants. Intertextualité, inventivité de la langue, tout participe à nourrir un imaginaire déjà foisonnant. Il faut plonger dans la série Blaise ou encore dans le désopilant Catalogue de parents pour les enfants qui veulent en changer pour s'en convaincre. «Lorsque je suis arrivé, il y avait un terrain formidable, explique-t-il. Il y avait des gens dont c'était le métier de s'occuper des enfants. Il y avait eu Françoise Dolto. Grégoire Solotareff avait aussi commencé à écrire pour eux. Le terrain était labouré, ratissé, arrosé. Je n'avais plus qu'à faire mon château de sable au milieu. Je n'ai rien inventé. J'ai bénéficié de tout ça.»

Des prix et des poussins

Si la littérature jeunesse tarde encore à jouir d'une certaine reconnaissance, imaginez lorsqu'on parle d'une littérature s'adressant à la petite enfance... «Oui, ça ne peut pas être pire, lance Ponti qui a pourtant gagné plusieurs prestigieux prix. Il n'y a pas de communication entre la littérature pour adultes et celle pour enfants. Lorsque j'ai décidé d'écrire pour les adultes, on m'a traité comme si j'étais un débutant. J'ai même connu un salon du livre où les auteurs jeunesse mangeaient moins bien! Nous sommes parfois moins bien logés. À partir de là, on prend dans la figure ou on s'en fout.»

Non seulement l'auteur choisit-il la deuxième option, mais il voit même un certain avantage à son statut. «On ne se préoccupe pas beaucoup de nous puisqu'on ne compte pas», souligne-t-il d'un air taquin.

«On fait donc beaucoup plus longtemps que d'autres ce qu'on veut. Nous sommes plus libres. Aussi, des enfants, c'est franc, direct, honnête. Des adultes, c'est... faux cul», lance-t-il soudainement avant d'arborer le sourire crasse d'un gamin qui a dit un gros mot.

«Lorsqu'un enfant vous parle d'un livre qu'il a lu, vous avez l'impression que les personnages dont il parle sont là avec vous. Il y a des odeurs, des bruits. Après, ils grandissent et disent que ce livre leur a beaucoup plu, qu'il est bien construit, qu'ils ont vu où était le narrateur, blablabla. C'est triste.»

Un musée extraordiépatant

Lorsque Ponti parle du MUZ, la galerie virtuelle d'oeuvres d'enfants qu'il a imaginée et qui sera en ligne dans quelques jours, ses yeux s'illuminent comme ceux de Lili Prune et l'auteur devient intarissable. «Ça fait trop longtemps que les oeuvres des enfants sont mal considérées, jetées à la cave ou ailleurs, soutient-il. Je voulais que les enfants sachent que parmi eux, certains font des choses remarquables et qu'il y a des adultes pour le remarquer. Que ces oeuvres font partie du patrimoine culturel humain.»

L'auteur a également dans son sac magique un autre projet qui semble l'enthousiasmer. Ponti dans l'aventure d'un film 3D? Imaginez les possibilités poussinesques! «On m'a souvent proposé des projets pour la télévision mais j'ai toujours refusé car ils auraient détruit ce que j'ai fait en livre. Or, j'ai confiance en ce projet de film. Et puis, l'arrivée du livre électronique m'inquiète», admet Ponti avec (faux?) sérieux. «Maintenant je peux répondre: c'est pas grave! Je travaille sur un film.» Sacré Ponti.

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Claude Ponti sera au Salon du livre aujourd'hui, de 14 h à 15 h 30, ainsi que samedi de 15 h à 16 h 30 et dimanche, de 11 h à 12 h. Visitez le site au www.salondulivredemontreal.com