On le savait irréductible, le voilà éternel! La décision d'Albert Uderzo d'autoriser la poursuite des aventures d'Astérix après sa disparition offre une seconde vie au petit guerrier gaulois, qui fête cette année ses 50 ans.

Une surprise pour ses fans et un enjeu de taille pour Hachette Livres, qui exploite désormais la série, vendue à 325 millions d'exemplaires dans le monde.

À 81 ans, le dessinateur, qui avait toujours affirmé le contraire, a accepté que ses personnages lui survivent. Un revirement qui s'inscrit dans un phénomène de reprises des grands personnages de la BD dont la cote reste intacte auprès du public.

«Après mûre réflexion, j'ai pensé que le succès d'Astérix appartient en partie aux lecteurs», a expliqué Albert Uderzo à l'AFP. Et Anne Goscinny, la fille du scénariste René Goscinny décédé en 1997, a également donné son accord.

Uderzo a surtout regardé autour de lui : Spirou, Lucky Luke, Blake et Mortimer, Les Schtroumpfs, Boule et Bill... la plupart des personnages mythiques de la BD des 50 dernières années ont survécu à leurs créateurs.

Après la mort d'Edgard P. Jacobs, les éditions Dargaud ont confié Blake et Mortimer à de nouveaux auteurs en 1997. Banco! Chaque nouvel album s'écoule depuis à 600 000 exemplaires. Jean Roba, disparu en 2006, a formé lui-même son successeur, Laurent Verron, pour reprendre Boule et Bill après son décès. Et Les Schtroumpfs sont toujours aussi bleus à plus de 50 ans.

Autant de séries qui bénéficient de campagnes de promotion massives et comptent parmi les meilleures ventes en bandes dessinées. Le contre-exemple, c'est bien sûr Tintin, Hergé ayant refusé de son vivant toute reprise du personnage.

Uderzo a regardé ce que son confrère Achdé, dont le dessin répète à l'identique celui de Morris, décédé en 2001, a fait avec Lucky Luke. Avec l'humoriste Laurent Gerra au scénario, Achdé a relancé la série, dont le dernier album a été tiré à plus de 500 000 exemplaires en 2008.

«Astérix est plus fort que moi. Il me survivra», déclare aujourd'hui Albert Uderzo. Une décision que conteste sa fille Sylvie, en conflit avec son père après le rachat des Éditions Albert-René par Hachette Livres.

Entre le père et la fille, c'est désormais «Le grand fossé». «Je persiste à soutenir que permettre la poursuite de la création de l'oeuvre de René Goscinny et d'Albert Uderzo, inconditionnellement, contrairement a ce que mon père avait toujours affirmé, pose problème», écrit-elle dans un communiqué à l'AFP.

«En confiant cette mission, et ce n'est pas leur faire injure, à un groupe soumis à des impératifs notamment de rentabilité, c'est prendre le risque de détourner la philosophie du personnage devenu un des symboles du patrimoine français», poursuit Sylvie Uderzo, qui «ne parvient pas à trouver que cela soit une bonne nouvelle».

Pour l'instant, Albert Uderzo, dont le dernier album brillait plus par le dessin que par le scénario, travaille à un nouvel album intitulé Le livre d'or d'Astérix à paraître en octobre pour le 50e anniversaire d'Astérix.

En 2005, le dernier album en date, Le ciel lui tombe sur la tête, s'était vendu à plus de trois millions d'exemplaires en quelques semaines.

Les séries historiques sont aujourd'hui des valeurs refuges pour les lecteurs déboussolés par la masse d'albums qui parait chaque année. Hachette peut nourrir de grands espoirs pour l'après-Uderzo.