Nombreux sont les écrivains qui gagnent leur vie comme professeurs. Est-ce que cela influe sur leur vie d'auteurs? Comment voient-ils leur travail de prof? Qu'en pensent leurs élèves? Jean-Marc Beausoleil a reçu La Presse dans son cours d'introduction à la littérature au cégep John-Abbott de Sainte-Anne-de-Bellevue.

L'établissement

Situé à la pointe ouest de l'île de Montréal à Sainte-Anne-de-Bellevue, le cégep John-Abbott - du nom du troisième premier ministre du Canada - offre, entre autres, des spécialités en techniques policières et en sciences de la nature. L'un des cinq cégeps anglophones du Québec, il accueille 6500 élèves. 

Le parcours

«J'écris depuis que je suis ado. Après avoir passé deux mois en Europe à 18 ans, j'ai décidé que j'allais devenir écrivain. J'avais lu Kerouac et Bukowski sur la route en Europe. Quand j'ai fini ma maîtrise en littérature française à McGill, j'ai passé un an en Haïti et j'ai enseigné là-bas. Au retour, j'avais besoin de travailler rapidement. Comme j'avais fait du journaliste étudiant, je suis entré au magazine Dernière Heure. J'ai fait plusieurs médias en 10 ans, mais ça tournait en rond. Il y a 11 ans, j'ai envoyé des CV et je suis entré à John-Abbott au moment d'un changement de garde.»

L'auteur

«Mon premier roman, La conversation française, a été publié quand j'avais 30 ans, chez Lanctôt», dit-il. Parmi les titres préférés qu'il a publiés jusqu'ici: Blanc bonsoir. «C'est un livre basé sur mon expérience en Haïti, mais que j'ai publié un an après le tremblement de terre, en 2011.» Joie de combat: «C'est inspiré de l'histoire des expropriés de Guindonville, à Val-David, avec un couple qui se trouve des deux côtés de la barrière de l'expropriation.» Docteur jazz: «C'est un peu l'histoire de Jelly Roll Morton, mais transposée sur celle d'un pianiste d'aujourd'hui à Montréal. C'est un mélange de fiction et de réalité, de présent et de passé.»

Le prof

En classe, Jean-Marc Beausoleil est d'une énergie qui semble éternellement renouvelable. Il fait souvent référence à des notions bien connues des jeunes, même si son cours parle du passé: films, musique rap, télé, égoportraits... «J'ai fait beaucoup d'impro et un peu de théâtre quand j'étais jeune. Je veux que la littérature, ce soit intéressant, vivant. Je lis un livre par semaine pour le plaisir et mes lectures sont au service de mes élèves. Je ramène ça en classe avec moi. Je suis payé pour parler de livres que j'aime.»

Le cours

Il donne aussi un cours d'introduction aux médias et de français langue seconde. Dans son cours d'introduction à la littérature, «je suis peut-être plus libre qu'un prof de français dans un cégep francophone parce qu'il n'y a pas d'examen du Ministère et que le devis est concis: les élèves doivent traiter d'un sujet culturel. On voit les grands moments historiques, et je fais des liens avec des textes. On parle de la nature en lisant un extrait de Montaigne sur les cannibales. Le XVIIIe siècle, c'est mon préféré, mais on va jusqu'aux contemporains, et je leur donne à lire Sollers et Houellebecq.»