Dans la distribution de la pièce Ne m'oublie pas au Théâtre Jean-Duceppe jusqu'au 25 mars, la comédienne Louise Turcot vient tout juste de lancer Laura, qui raconte l'histoire d'une ado qui tente de trouver sa place dans la vie. Ce roman jeunesse est, mine de rien, son septième titre publié. Louise Turcot nous a parlé de sa vie en livres.

Votre premier souvenir de lecture?

«Comme pour toutes les femmes de ma génération, le choix était assez restreint, et je me réjouis de voir que les enfants d'aujourd'hui ont à leur disposition tant de livres variés et de grande qualité. La Comtesse de Ségur était l'auteure numéro un des best-sellers de ma jeunesse, et Un bon petit diable, mon livre préféré dont j'ai toujours conservé l'exemplaire malgré mes nombreux déménagements. Ce qui me fascinait, je crois, c'est que le roman était rédigé sous forme de dialogues avec les noms des personnages qui apparaissaient tour à tour. Je me souviens que je m'amusais à lire à haute voix les phrases de Juliette, la petite aveugle si bienveillante à laquelle je m'identifiais totalement. Eh oui, je faisais déjà du théâtre!»

Image fournie par la maison d'édition

Un bon Petit Diable, de la Comtesse de Ségur

Le livre qui a changé votre vie?

«À 16 ans, un ami m'a fait découvrir Blaise Cendras. J'ai d'abord lu L'Or pour ensuite découvrir son recueil de poésie Du monde entier au coeur du monde, où l'on retrouve le magnifique poème Prose du Transsibérien et de la petite Jeanne de France. J'étais déjà folle de Verlaine, d'Apollinaire, de Rimbaud, et je découvrais tout à coup que l'on pouvait écrire de la poésie d'une tout autre façon. Ce fut un choc. Blaise Cendras m'a ouvert les yeux. Oui, la poésie pouvait naître partout, il suffisait d'être à l'affût.»

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L'or, de Blaise Cendrars

Le livre qui est sur votre table de chevet en ce moment?

«Il y en a plusieurs! Je lis toujours au moins deux livres en même temps. Il y a Écorchée de Sara Tilley, que je viens juste de terminer. Premier roman d'une jeune auteure de Saint-Jean de Terre-Neuve, que j'ai découvert par hasard en fouinant en librairie. On dit d'elle qu'elle est une étoile montante de la littérature. Moi, je crois qu'elle va briller longtemps et j'attends avec impatience la traduction française de son nouveau roman. L'autre livre, que je déguste à petites doses, c'est Le comédien désincarné de Louis Jouvet, que j'ai acheté à Paris à Noël. Écrites entre 1939 et 1950, ces notes quotidiennes de Jouvet sur son métier d'acteur et de metteur en scène, préfacées avec passion par Fabrice Luchini, sont fascinantes. Ce livre est un précieux outil de réflexion et il restera pour toujours sur ma table de chevet.»

Le livre que vous relisez souvent?

«Le ravissement de Lol V. Stein de Marguerite Duras. Je l'ai lu pour la première fois en 1996 et j'ai été fascinée par le personnage de Lol V., qui n'était pas sans me rappeler celui de Blanche DuBois dans Un tramway nommé désir, que j'avais joué en 1993. Une femme fragile, une salle de bal, un amour blessé. Il y a dans ce roman une atmosphère de trouble et de mystère entourant le personnage principal que Marguerite Duras réussit à créer avec une rare finesse. J'ai d'abord été touchée, je l'ai ensuite relu pour essayer de comprendre où se situait la magie de cette écriture et, finalement, je le relis simplement pour entrer dans cet univers et m'abandonner à son charme. Un bon livre, c'est comme une musique qu'on aime, on peut y replonger quand on en a besoin et y trouver chaque fois des sensations nouvelles. Lol V. Stein est un ravissement!»

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Le ravissement de Lol V. Stein, de Marguerite Duras

Le livre que vous n'avez jamais lu et vous ne savez pas pourquoi?

«La Divine Comédie de Dante est depuis longtemps dans ma bibliothèque. Après plusieurs essais, je crois que je vais me résigner à m'avouer que je n'y arriverai jamais. Jorge Luis Borges, pour qui j'ai une grande admiration, a déclaré dans une de ses conférences: "La Divine Comédie est un livre que nous devons tous lire. Ne pas le faire, c'est se priver du meilleur don que la littérature puisse nous offrir..." Il assure que nous devons simplement nous laisser bercer par les mots. C'est le genre de lecture qui me remet page après page face à mes carences en matière de mythologie, d'histoire de l'Antiquité, de philosophie, et il faudrait que je vive encore 50 ans pour combler tous ces vides. Je vais donc laisser Borges me raconter toute la beauté de l'oeuvre de Dante et ranger La Divine Comédie tout en haut de ma bibliothèque.»