Au pays des champs de lave et des glaciers qui ont inspiré Arnaldur Indridason, on écrit «pour oublier le froid et l'obscurité», raconte Ragnar Jónasson dans Snjór.

Comme le personnage de son roman, l'auteur choisit l'hiver pour délier sa plume, ces longs mois d'obscurité où la météo imprévisible et impitoyable peut rebuter même les moins frileux. «L'été, je change mes habitudes complètement et je passe beaucoup plus de temps à l'extérieur», reconnaît-il de Reykjavík, où il habite. 

C'est cependant bien loin de la capitale que sont situés ses romans. Précisément à Siglufjördur, une ville de 1200 âmes dans le nord de l'Islande, où ont vécu ses grands-parents. La même où a été filmée la série télévisée à succès Trapped, de Baltasar Kormákur, diffusée notamment par la BBC l'hiver dernier. «C'est le théâtre idéal pour un roman policier», estime Ragnar Jónasson.

Niché dans un fjord cerné d'imposantes montagnes, Siglufjördur n'est accessible que par un tunnel fréquemment bloqué par les tempêtes de neige durant l'hiver. La noirceur quasi permanente, qui s'étire de novembre à janvier, ajoute au décor un élément surréel.

L'Islande au complet semble d'ailleurs exercer une véritable fascination sur les amateurs d'intrigues policières. Le Britannique Quentin Bates, traducteur anglais des romans de Ragnar Jónasson, s'est lui-même laissé inspirer par le pays où il a vécu plusieurs années pour écrire sa propre série située en terre de glace, centrée autour de la sergente Gunnhildur. Il y a quelques années, il a découvert qu'il n'était pas le seul à s'inspirer des paysages sauvages du nord et qu'il existait, à sa grande surprise, plusieurs «prétendants nordiques».

«L'Islande est un cadre intéressant. Mais le défi, c'est qu'on se retrouve constamment dans une intrigue à huis clos parce qu'on se trouve dans une île très peu peuplée», précise Quentin Bates.

«Il n'y a pas d'échappatoire possible. Le protagoniste ne peut pas disparaître, quitter la ville et changer de nom parce que, tôt ou tard, il va rencontrer quelqu'un qui le connaît.»

C'est sous ces cieux battus par les vents, à Reykjavík même, que Ragnar Jónasson, Quentin Bates et l'auteure de polars Yrsa Sigurdardóttir ont décidé, en 2013, de créer un festival de polars. L'événement baptisé Iceland Noir a reçu nul autre qu'Arnaldur Indridason à titre d'invité d'honneur lors de la première édition, et s'apprête à accueillir dans quelques mois bon nombre d'auteurs venus de l'étranger, dont l'Écossaise Val McDermid.

«Tout se passe en anglais et nous avons des visiteurs de partout», dit Ragnar Jónasson, qui prépare la quatrième édition, en novembre prochain. L'atmosphère lugubre et l'obscurité hivernale, elles, seront bien entendu au rendez-vous.

Photo tirée de Twitter