L'Américaine Harper Lee, rendue célèbre en 1960 par son best-seller To Kill A Mockingbird (Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur), est décédée à 89 ans dans sa petite ville natale de l'Alabama, loin des projecteurs qu'elle avait toujours détestés.

Une porte-parole de la maison d'édition Harper Collins à New York a indiqué qu'elle était décédée tranquillement jeudi soir. Celle qui avait reçu le prix Pulitzer en 1961 pour son premier roman, succès planétaire, vivait loin des regards dans une maison de retraite de Monroeville (Alabama), ayant des difficultés à voir et entendre.

Grand classique de la littérature américaine du 20e siècle, étudié dans les écoles et universités, To Kill A Mockingbird raconte la haine et les préjugés racistes dans le sud des États-Unis durant la Grande dépression des années 30.

Il mettait en scène Atticus Finch, un avocat blanc défendant un Noir accusé de viol, dans une ville fictive de l'Alabama. La narratrice du roman est sa fille, surnommée Scout.

Harper Lee s'était inspirée de son enfance et notamment de son père avocat pour ce premier roman, vendu en anglais à quelque 30 millions d'exemplaires et traduit en 40 langues.

Le livre est adapté au cinéma en 1962 par Robert Mulligan, avec Gregory Peck dans le rôle d'Atticus, sous le titre français Du silence et des ombres. Le film reçoit trois Oscars.

À 34 ans, la gloire est instantanée pour Harper Lee, de son vrai nom Nelle Harper Lee, qui devient une sorte de conscience morale.

En 1964, elle raconte dans une rare confidence qu'elle ne s'y attendait pas.

«Je n'attendais aucun succès pour To Kill A Mockingbird», explique-t-elle, ajoutant qu'elle pensait être mise à mort par les critiques. «Mais j'espérais quand même que quelqu'un l'aimerait assez pour me donner un encouragement. Un encouragement public. J'en espérais un petit, j'en ai eu beaucoup, et d'une certaine façon, c'était aussi effrayant que la mort rapide et sans pitié à laquelle je m'attendais».

Cette célibataire fuit la célébrité, refuse des centaines d'interviews et ne publiera rien d'autre jusqu'à la surprise de Go Set a Watchman (Va et poste une sentinelle) l'an dernier, qui se place instantanément en tête des ventes de livres aux États-Unis.

Ce n'est pas un nouveau roman: il avait été écrit à la fin des années 50, mais refusé par l'éditeur qui avait demandé à la jeune débutante de revoir sa copie. De là était né To Kill A Mockingbird, avec les mêmes personnages.

«Le monde sait qu'Harper Lee était une auteure brillante, mais ce que beaucoup de gens ne savent pas, c'est qu'elle était une femme extraordinaire, très joyeuse, d'une grande humilité et gentillesse», a déclaré vendredi le président d'Harper Collins Michael Morrison.

«Elle a vécu la vie qu'elle voulait - en privé - entourée de livres et des gens qui l'aimaient».

Esprit brillant

«Le monde a perdu un esprit brillant et un grand auteur», a écrit Spencer Madrie, propriétaire de Ol' Curiosities and Book Shoppe, la petite librairie indépendante de Monroeville (6000 habitants).

Harper Lee, née le 26 avril 1926 à Monroeville, était la dernière de quatre enfants. Elle était aussi une descendante du général Lee, commandant des troupes sudistes pendant la guerre de Sécession.

Truman Capote a été l'un de ses amis d'enfance, et elle a été son assistante dans l'écriture de De sang-froid, son enquête sur un fait divers sanglant au Kansas.

Enfant précoce, elle avait appris à lire très tôt, la lecture étant à Monroeville l'une des rares distractions.

Elle renonce en 1949 à ses études de droit pour tenter sa chance dans la littérature à New York. Elle y travaille dans un bureau de réservation de billets d'avion, écrit en parallèle, trouve un agent en 1956.

En 2007, elle avait reçu du président George W. Bush la Médaille présidentielle de la liberté, la plus haute distinction civile américaine.

To Kill A Mockingbird, le premier livre qu'elle a publié, «a influencé pour le meilleur le caractère de notre pays», avait déclaré M. Bush. «Cela a été un cadeau pour le monde entier».

Harper Lee avait également reçu en 2010 du président Barack Obama la Médaille nationale des arts.