L'année 2014 a été difficile pour la maison d'édition Trois-Pistoles de Victor-Lévy Beaulieu. Plusieurs auteurs ont réclamé en vain leurs droits pendant des mois. Mais Rambo s'amène à la rescousse.

Victor-Lévy Beaulieu avait prévenu qu'il fermerait les Éditions Trois-Pistoles en décembre dernier s'il n'arrivait pas à combler un manque à gagner de 35 000 $ à la suite d'une coupe d'Ottawa et d'un retard de Québec.

La maison d'édition reste ouverte pour le moment. En fait, la biographie du chef syndical Bernard «Rambo» Gauthier signée par M. Beaulieu lui-même devrait lui permettre de sauver les meubles. «Le livre s'est bien vendu et nous permettra de verser des droits d'auteur dès février», dit l'écrivain et éditeur.

M. Beaulieu soutient que le Conseil des arts du Canada (CAC) a réduit sa subvention de 20 000 $ en 2014 et qu'il attend toujours, depuis le mois de juillet dernier, une somme de 15 000 $ de la part de la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC).

«J'ai donc écrit aux auteurs pour leur dire que le versement de leurs droits serait en retard. Ce sont des imprévus qui ont causé un manque de liquidités», soutient-il.

Auteurs mécontents

Or, des auteurs affirment que le problème de versement des droits remonte à plusieurs années aux Éditions Trois-Pistoles. C'est le cas de Francine Allard (auteure de La couturière et De l'eau sur le papier).

«Il me doit près de 10 000 $, sans compter un chèque de 12 000 $ que ni lui ni moi n'avons retrouvé nulle part, déclare-t-elle. Il écoule mes romans chez Costco à la moitié du prix, mais je n'ai rien reçu depuis trois ans.»

Mme Allard, qui publie désormais ses romans dans une autre maison d'édition, dit avoir beaucoup de respect pour Victor-Lévy Beaulieu le romancier, mais plus pour l'éditeur.

Même son de cloche chez Yvon Paré, qui a publié Le réflexe d'Adam aux Éditions Trois-Pistoles dans les années 90.

«Cela a pris plusieurs années avant que je reçoive mes droits d'auteur, maintient-il. S'ils ont été coupés par le Conseil des arts, c'est justement parce qu'ils ne paient pas toujours les droits comme ils le devraient.»

Un autre auteur, François Désalliers, dit n'avoir rien reçu d'autre qu'un à-valoir de 1200 $ pour son roman Le jour où le mort a disparu, publié en 2011.

«Je n'ai aucune preuve comme quoi mon livre ne s'est pas bien vendu. J'ai demandé les rapports de ventes et n'ai même pas reçu de réponse. Quand je publie chez d'autres éditeurs, je reçois toujours les rapports de ventes.»

Victor-Lévy Beaulieu réplique que le jury du CAC a plutôt sabré en 2014 la subvention à Trois-Pistoles en reprochant à la maison de «s'éparpiller» et de «ne plus répondre à son mandat».

En outre, les maisons d'édition ne sont pas tenues d'envoyer des rapports de ventes aux auteurs si les ventes sont inférieures à ce qui était prévu par contrat.

«Les auteurs ne connaissent pas tous les frais dont l'éditeur doit s'acquitter pour publier leurs livres. La situation est difficile pour des maisons comme la nôtre», explique le directeur des Éditions Trois-Pistoles.

L'éditeur est présentement en campagne de financement pour permettre à Victor-Lévy Beaulieu l'auteur de publier son livre sur Nietzsche, une brique de 1400 pages, et de former une relève en édition. Jusqu'ici, 116 000 $ ont été recueillis sur un objectif de 150 000 $.

Une chose sur laquelle l'éditeur et les auteurs s'entendent toutefois, c'est qu'il est grand temps de tenir des états généraux de l'édition au Québec pour éviter d'autres drames comme la faillite des éditions La courte échelle.

PHOTO FOURNIE PAR LES ÉDITIONS TROIS-PISTOLES

La biographie de Bernard «Rambo» Gauthier.