Le ministre de la Culture du Québec a émis mercredi soir un avis pour s'assurer que la copie manuscrite du célèbre poème Vaisseau d'or, mise aux enchères sur le site eBay, demeure au Québec et soit «accessible» à la population. Et son vendeur n'est pas fermé à l'idée de suspendre l'encan.

L'attaché de presse de Maka Kotto, Marc-André de Blois, a confirmé le dépôt d'un avis d'intention de classement. En posant ce geste, le ministère pourra avoir le temps «d'évaluer le dossier rigoureusement, notamment en ce qui concerne l'authenticité du document», a expliqué M. de Blois.

Un vendeur anonyme a mis aux enchères lundi l'une des oeuvres les plus marquantes du poète québécois. Le prix de départ de l'encan a été fixé à 50 000 $ US, et les acheteurs potentiels ont jusqu'au 11 mars pour y participer - à moins qu'une personne ne se décide à débourser 100 000 $ US afin de mettre la main sur la précieuse pièce de collection sur-le-champ.

En vertu de l'avis d'intention de classement, le document pourra ainsi être vendu. Il ne pourra toutefois quitter le Québec; il devient, en quelque sorte, un bien patrimonial culturel québécois et doit à ce titre demeurer «accessible» aux citoyens de la province, a précisé le bureau du ministre Kotto.

Le relationniste du vendeur, qui préfère conserver l'anonymat, a assuré que son client ne s'était pas engagé dans une opération mercantile en lançant cette vente aux enchères. D'ailleurs, les profits dégagés grâce à cette vente serviraient à financer un souper pour les sans-abri montréalais qui se tiendrait au cours des prochains mois, a précisé Jean-Paul Paloux. Et si le ministre Kotto plaidait qu'en période de compressions budgétaires, la vente devrait être mise en suspens, ledit vendeur serait ouvert à l'idée, a confirmé M. Paloux en entrevue téléphonique tard mercredi soir.

En début de journée, mercredi, deux étudiants s'étaient mobilisés pour tenter d'amasser des fonds afin d'assurer le sauvetage de l'oeuvre.

Félix Brabant, étudiant en sciences politiques à l'UQAM, et son collègue Nicolas Groulx, qui fait ses études en arts et lettres au collège Ahuntsic, s'apprêtaient à lancer une campagne de financement en ligne sur le site Haricot.ca.

L'objectif est d'amasser les fonds minimaux nécessaires pour participer à l'enchère, a expliqué M. Brabant mercredi après-midi.

«Le projet très fou serait de racheter cette oeuvre-là au nom d'une fondation qui serait éventuellement créée, de la diffuser et la rendre disponible au public», a exposé l'étudiant de 23 ans.

«On aimerait que la fondation qu'on va créer diffuse l'oeuvre dans les musées et les bibliothèques à travers le Québec (à) pour éviter que ça reste privé étant donné que ça fait partie du patrimoine culturel du Québec», a spécifié Félix Brabant.

Si la campagne n'atteignait pas son objectif, les fonds ne seraient pas débités des cartes de crédit des donateurs, assure-t-on sur la page Facebook de la campagne de souscription.

Nicolas Groulx a confirmé que son collègue et lui avaient été en contact avec le bureau de Maka Kotto au courant de la journée de mercredi.

Selon le vendeur, le poème Vaisseau d'or est signé et daté du 4 mars 1912. Il aurait donc été couché sur papier quelques années après la première écriture du poème, qui remonte à 1899.

Si la copie en vente est effectivement authentique, il s'agirait de l'exemplaire qui a été présenté au Musée de la civilisation de Québec entre 2008 et 2009 dans le cadre de l'exposition «Or des Amériques», a confirmé le responsable des relations de presse de l'institution muséale, Serge Poulin.

D'après le Musée de la civilisation de Québec, l'acquisition d'une telle pièce d'histoire relèverait davantage du mandat de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BANQ).