La Commission européenne a mis fin jeudi à son enquête visant quatre éditeurs internationaux et Apple pour collusion concernant les prix des livres électroniques, après leur engagement à modifier leurs accords avec les détaillants, en particulier Amazon.

La Commission est «satisfaite» des engagements des éditeurs et d'Apple, qui avaient été annoncés le 19 septembre, a déclaré le commissaire chargé de la Concurrence, Joaquin Almunia.

«Ces engagements vont rétablir les conditions normales de concurrence sur ce marché récent et en rapide évolution, pour le bénéfice des clients et des lecteurs de livres électroniques», a-t-il ajouté au cours d'une conférence de presse.

L'enquête avait été ouverte en décembre 2011. Elle visait Simon & Schuster (CBS Corp, États-Unis), Harper Collins (News Corp, États-Unis), Hachette Livre (Lagardère Publishing, France) et Verlagsgruppe Georg von Holtzbrinck (qui détient notamment MacMillan, Allemagne), ainsi qu'Apple, inventeur de l'iPad.

Le problème identifié par la Commission est concomitant avec l'apparition de l'iPad. Auparavant, c'étaient les distributeurs, et non les éditeurs, qui déterminaient le prix des livres.

Mais concernant les livres électroniques, la Commission soupçonnait ces éditeurs de s'être entendus pour passer de ce modèle de distribution de gros à un modèle fondé sur des «contrats d'agence» qui leur permettait d'influer sur le prix de détail. Apple bénéficiait dans ce schéma d'un taux unique de commission de 30%.

«Nous soupçonnons fortement que cela faisait partie d'une stratégie globale pour restreindre la concurrence et relever les prix de détail» des livres électroniques, a expliqué M. Almunia.

Quand bien même l'inquiétude des éditeurs concernant les prix de détail des livres électroniques serait justifiée, «le fait de résoudre cette situation par la collusion est inacceptable», a-t-il souligné.

Selon la Commission, les détaillants étaient menacés de ne plus être fournis en livres électroniques s'ils n'acceptaient pas ces accords.

«Les détaillants n'avaient guère le choix et devaient abandonner leurs prérogatives en matière de fixation des prix s'ils voulaient éviter que leurs activités ne soient sérieusement entravées», a souligné M. Almunia.

La décision de la Commission devrait donc satisfaire les distributeurs, au premier rang desquels Amazon, qui souhaitaient pouvoir commercialiser des e-books à des prix inférieurs.

Les quatre éditeurs et Apple se sont engagés à mettre fin aux contrats d'agence actuels et à ne pas conclure de contrats du même type pendant cinq ans. Ils se sont aussi engagés à faire en sorte que les détaillants puissent accorder des remises sur le prix des livres numérique pendant deux ans, sous conditions.

La décision de Bruxelles ne concerne pas un cinquième éditeur, Penguin (groupe Pearson), car ce dernier a décidé de «ne pas proposer d'engagements» aux autorités européennes. «Néanmoins, la Commission est engagée dans des discussions constructives avec Penguin» qui laissent augurer d'une prochaine solution, a-t-elle indiqué.

Le marché de l'e-book est en phase de décollage en Europe, même si le livre papier résiste davantage qu'aux États-Unis, où les ouvrages électroniques représentent environ 20% de tous les livres vendus en 2012.

En avril, Hachette Livre, Simon & Schuster et Harper Collins avaient passé un accord à l'amiable avec les autorités américaines pour clore des poursuites sur le prix des livres numériques. Ils avaient accepté de payer 69 millions de dollars pour dédommager des consommateurs, et de changer leurs pratiques pour permettre aux distributeurs de réduire le prix de leurs titres.