Yuri Herrera

Traduit par Laura Alcoba Gallimard, 120 pages

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Cette petite fable d'un jeune auteur mexicain a beaucoup à dire sur la relation entre l'artiste et le pouvoir. Un soir à la taverne, un puissant seigneur de guerre entend le chant de Lobo, un pauvre chanteur itinérant. Le seigneur - un grand caïd de la drogue - s'éprend de cette musique et invite le musicien à devenir le poète de sa cour. Ce n'est pas une invitation, mais une sommation, et Lobo se retrouve mêlé aux intrigues de ce monde violent. Il tente de garder son indépendance, mais la pression est grande: s'il ne veut pas retourner vivre dans un abri fait de carton, il doit se faire le chantre du seigneur. L'auteur s'inspire des musiciens mexicains qui composent des corridos, des histoires chantées qui racontent les gloires des narcotrafiquants. «Le corrido n'est pas un tableau pour faire joli sur un mur», lit-on dans ce récit aussi sec que le désert par où passent les cargaisons de drogue. «C'est une arme.» Une arme à double tranchant, car lorsque le héros dont on a chanté les louanges tombe, que faire de ses chansons? La mort guette Lobo, mais protégé par le bouclier de sa parole, le petit chanteur se révèle plus grand que les seigneurs de ce monde.