Montréal, métropole culturelle? Combien de fois a-t-on posé la question au cours des dernières années?

Le colloque de 2009 Les métropoles culturelles dans l'espace francophone ne répond pas à la question. Réunies dans un recueil néanmoins éclairant, les communications des participants québécois, belges et français à cette rencontre placée sous l'éclairage de la littérature estiment que la question est ailleurs, voire dépassée. Montréal est au monde, un peu à l'exemple de Bruxelles d'ailleurs.

Si, dans les romans, Montréal est mieux considérée que sa consoeur belge, les deux villes partagent plusieurs traits communs: attachantes, poétogéniques - comme on dit photogéniques -, pleines de contrastes et de dissemblances, presque illisibles, totalement plurielles et mystérieuses. Ces mots, employés par les Belges Jacques de Decker et Jean-Baptiste Baronian, parlent très bien de Montréal.

Historiquement, pour tous les francophones, le mot métropole désignait Paris. Mais tous constatent aujourd'hui le déclin de la Ville lumière comme phare de la francophonie et pôle d'attraction, voire comme la ville culturelle par excellence de langue française. Selon Régine Robin, Paris a cessé de faire rêver. Mégalopolisée, morcelée, découpée, la ville ne va plus de l'avant. Il faudrait, écrit-elle, que Paris «renoue avec l'imaginaire».

Ici heureusement, notre monde littéraire s'est forgé une spécificité nord-américaine, un profil multiple. La distance a aidé Montréal, à l'inverse de Bruxelles qui a souffert de sa proximité avec la capitale française. Mais nos écrivains ne s'accordent pas sur le statut de métropole de Montréal.

Madeleine Monette explique que Montréal serait, en fait, «décentrée». La ville n'aurait plus tant besoin d'être la métropole du Québec puisqu'elle est ville du monde, notamment dans le bagage de ses créateurs qui la transposent, la transforment en la transportant avec eux.

Ponts

Montréal ville ouverte, Montréal accueillante. Sherry Simon a étudié la question des ponts entre les communautés linguistiques et culturelles, notamment des écrivains étrangers venus vivre à Montréal.

«Montréal n'est plus la ville divisée qu'elle était dans les années 50 et 60, dit-elle. Dans l'espace d'une génération, un processus de francisation a eu pour effet la création d'une nouvelle montréalité, une ville cosmopolite où domine le français et où se multiplient les zones de contact et les productions culturelles qui font état d'interférence et de métissage à l'intérieur du français...»

Mais qui a besoin d'une capitale culturelle? , demande quant à lui Jacques Godbout, puisque «le monde entier est à portée de clavier».

Montréal créative est partout aussi, là où l'on perd «la maîtrise du processus», comme écrit Suzanne Jacob avec ironie, nous trimballant de Montréal à Bruxelles en passant par Paris, du temps présent au passé d'Homère: «Montréal n'est plus que la métropole culturelle d'elle-même dans la pleine mesure où elle se déclare l'être, parce que le beurre c'est du beurre...»

Ainsi, le concept de métropole culturelle a pris du mou. Peu importe. Quand on a l'écriture, quand on a la culture, à Montréal ou ailleurs, on a le monde.

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Les métropoles culturelles dans l'espace francophone


Sous la direction de Lise Gauvin

Hurtubise, 172 pages