Sobre et tendre. Tel a été hier l'hommage rendu à Nelly Arcan, à la Grande Bibliothèque, en présence d'amis et de membres de la famille de l'écrivaine, environ trois semaines après sa tragique disparition. Hommage organisé par Michel Vézina en collaboration avec les éditions du Seuil et Coups de tête où paraîtra son dernier roman, Paradis clef en main.

On alternait entre la lecture d'extraits de son oeuvre (par Violette Chauveau, Évelyne de la Chenelière, Sophie Cadieux, Kim Doré et Maxim Roy) et les témoignages de gens pour qui elle était chère. Grand contraste entre la dureté de ses écrits et le portrait dressé par ses amis, où apparaissait cette Nelly lumineuse, rieuse, intelligente, appréciée de tous.

«J'ai eu la chance de vibrer à ton contact, ce rire d'enfant résonnera toujours en moi, a dit son amie Geneviève Pierrat. Personne ne pouvait rien contre le fardeau que tu portais sur tes petites épaules. Peut-être n'étais-tu pas faite pour ce monde.» Martine Hébert, qui est devenue son amie en lui vendant son condo, a rappelé la femme de lettres très cultivée qu'elle était, travailleuse acharnée, un grand écrivain «qui malheureusement ne croyait pas l'être». «Elle était adorable et admirable, cet hommage, elle le méritait.»

Mélanie St-Pierre, qui l'a rencontrée à l'université, a raconté combien elle était heureuse à la publication de son premier roman, Putain, elle qui rêvait depuis toujours du métier d'écrivain. «Talentueuse comme tu l'étais, je croyais que l'écriture t'épargnerait cette fin.» Sa meilleure amie, Nancy Bouchard, a tenu à souligner qu'il ne fallait pas réduire Nelly Arcan à sa fin. «Ne lisez pas ses livres comme si c'était une carte du ciel ou par curiosité morbide. Cherchez plutôt à comprendre ce qu'elle avait à dire sur notre mode de vie.»

La journaliste Claudia Larochelle dit être «tombée en amitié» lorsqu'elle l'a rencontrée au début de sa carrière. «Ses détracteurs auraient préféré qu'elle se taise, mais elle a mené sa bataille jusqu'à la dernière parole.» Elle lui a souhaité de prendre un verre en compagnie de Marguerite Duras, Anne Hébert et Marguerite Yourcenar...

On a pu comprendre que l'amitié féminine était profonde et prolifique autour de Nelly Arcan, mais au terme de ces témoignages d'amies est arrivé celui de son amoureux, Laurent Aglat, poignant, qui a tiré les larmes à tout le monde. «Je l'admirais, mais elle ne me croyait pas, a-t-il confié, la voix brisée. Pas plus quand je lui disais qu'elle était belle. J'aurais voulu te dire tout ça à notre mariage, et pas ici pour ton hommage. Une vie complète sans toi, ma Louchti...» Leur mariage était prévu pour décembre. C'est dire combien l'hébétude est encore grande.

L'hommage s'est poursuivi ensuite à L'Usine C, de façon moins officielle et plus festive, peut-être plus à l'image de Nelly, et de ceux qui ont peuplé son univers.