«On ne prononcera plus le nom de Schubert, plus jamais.» Vienne 1828, le jeune Schubert meurt à 31 ans d'une syphilis carabinée, résultat d'un abonnement au bordel. Si admiratif de Mozart et de Beethoven, il pense que son oeuvre ne restera pas.

«Face à Mozart on est tâcheron.» Et puis, il a trop bu. Ce musicien mourant laisse 900 opus formant une oeuvre qui, effectivement, entre dans l'oubli avant que la génération suivante (Schumann, Mendelssohn, Liszt) ne la découvre, ne la rétablisse.

Pierre Charras, comme Bernard-Henri Lévy le fit avec Baudelaire, Tabucchi avec Pessoa et Echenoz avec Ravel, met en scène la sortie de vie d'un artiste de génie. L'exercice est une formule dévoyée des anciens «Tombeaux», odes admiratives et funéraires.

Chez Charras, le texte est ténu, il y manque la fougue de BHL, la magie de Tabucchi, la plume d'Echenoz. Cependant, les admirateurs du musicien autrichien, maître du lieder, y trouveront une réflexion sur le combat entre la musique et l'amour, la création et la vie, le corps et l'esprit.

Belle phrase que Charras accorde à Schubert pour expliquer ses pièces à quatre mains: «J'avais un besoin irrésistible de sentir l'un de mes semblables près de moi; épaule contre épaule, hanche contre hanche, souffle contre souffle; deux soi-même brassant la musique d'un élan commun; un seul coeur en deux corps, en trois corps, tant notre circulation sanguine irriguait le piano».__________________________________________________________________

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Le requiem de Franz. Pierre Charras. Mercure de France, 110 pages, 24,95 $