Danièle Bombardier n'est pas peu fière de la programmation 2009 des Correspondances d'Eastman, qui ont pour invités d'honneurs Marie-Claire Blais, un génie de notre littérature, et Marc Lévy, l'écrivain français le plus lu au monde. Mais c'est la réunion des écrivains des Amériques, le thème de cette année, qui la ravit le plus.

«Je suis fière d'avoir fait se déplacer Marie-Claire Blais, qui arrive de Key West, et de la voir réunie avec Catherine Mavrikakis. Que l'ouverture se fasse avec Chloé Sainte-Marie, alors que la même journée, son amie Joséphine Bacon sera d'un café littéraire portant sur le territoire, avec Serge Bouchard. Et que ça se termine avec Bïa, qui chantera des chansons brésiliennes le samedi soir. C'est une belle boucle.»

 

Et une belle brochette. Outre les Blais, Lévy, Mavrikakis, Bouchard et Laferrière, il y aura aussi Madeleine Monette, Nicolas Dickner, Jacques Folch-Ribas, Bernard Andrès, Stanley Péan, Jean Sioui ou Michel Vézina, pour ne nommer que ceux-là.

Tous unis par l'amour des lettres et la réflexion sur les Amériques. Sujet de prédilection de Serge Bouchard. «L'histoire de l'Amérique me passionne en tant que Québécois francophone de souche - ça existe, ça veut dire un ancien Canadien français catholique. Ma grande découverte, à la base de tout mon travail, c'est que l'Amérique septentrionale a été longtemps métisse et francophone. Que pendant longtemps, il y a eu ce rêve de créer un nouveau monde francophone et amérindien, mais il été étouffé et avorté. Il y a tellement d'États américains qui ont été fondés par des Canadiens français que c'est scandaleux qu'on n'en parle pas plus. Pendant que nos élites n'arrêtent pas d'avoir la nostalgie de la France, alors qu'il n'y a rien de moins français au monde que les Québécois.»

Riche comme thématique? Et comment. L'Amérique est au coeur de toute l'oeuvre de Dany Laferrière. «Je suis l'un de ceux qui ont défendu l'idée de sortir de la nostalgie de l'Europe pour faire en sorte que notre imaginaire se retrouve dans l'espace où nous vivons. Pour moi, c'est le Nouveau Monde, avec ses nouvelles possibilités, ses nouvelles formes. Ça n'a pas été facile, mais quelle aventure! Cette occupation du territoire par tous ceux qui fuient la famine ou la dictature, et ceux qui les reçoivent dans le choc et l'affection. Nous en sommes tous changés et cela continue.»

Semblable vision pour Catherine Mavrikakis. «Mêmes si on écrit Amériques au pluriel, ça reste pour moi une terre unie, qui s'oppose à l'Europe d'où on est partis. Pour moi, l'Amérique, c'est comme une métaphore, un imaginaire qui se déplace. Les explorateurs croyaient qu'ils allaient en Asie et sont arrivés ici. C'est comme un lieu fantôme, ça reste un endroit à découvrir, comme la Lune!»

«On est trop enfermés dans nos maisons. Notre territorialité nous échappe, ajoute Serge Bouchard. L'américanité, c'est une forme d'humanité sauvage, c'est encore le paradis terrestre.»

Une bonne raison de sortir de chez soi pour aller à Eastman, non?