Nuria Amat, née à Barcelone, est un écrivain pour écrivains. Elle explore les dédales de la création par le truchement de Franz Kafka.

 

Kafka, on le sait, c'est le romancier de la quête inutile, de l'accusation sans raison, c'est aussi l'écrivain qui a transformé un de ses héros en cafard dans la célèbre nouvelle Métamorphose. C'est donc l'homme qu'il fallait à Nuria Amat pour sonder les douleurs de la création. Elle se déguise tout à tour en épouse de Kafka, ou en fille de James Joyce (parfois, l'ordre est renversé), pour s'approcher des sources du génie.

Petit sous-texte féministe: les grandes plumes sont toujours tenues par les hommes. Parfois Amat se penche sur les douleurs de leurs machines à écrire. D'autres fois, elle décortique le couple légendaire de Leonard et Virginia Woolf avec de telles révélations: «Les couples d'écrivains d'habitude s'échangent des reproches à travers leurs romans.» Le sujet d'Amat est grave; son ton est plutôt enjoué. Nous croisons Louise Colet, la muse de Gustave Flaubert et de plusieurs hommes de lettres français. «Mes poètes!» dit-elle d'une voix flûtée. «Une façon aussi respectable qu'une autre d'aimer la littérature.» Ce livre, hors genre d'ailleurs, n'a pas d'intrigue. C'est plutôt le voyage imaginaire de Nuria Amat, femme de lettres espagnole et grande lectrice, à travers le labyrinthe des livres qu'elle a aimés, et qui l'ont formée, elle. C'est un petit tour chez les grands écrivains, transformés en êtres tout à fait humains par la plume d'Amat.

_______________________________

Nous sommes tous Kafka

Nuria Amat

traduit par Line Amselem

Allia, 238 pages,16.95$

***1/2