Marc Levy est l’écrivain français le plus lu dans le monde, selon les Éditions Robert Laffont. Vendus à plus de 45 millions d’exemplaires dans le monde, ses romans sont traduits en 49 langues. Voilà qu’il élargit encore son lectorat avec Le petit voleur d’ombres, une série de romans pour enfants dont les deux premiers tomes viennent de paraître. La Presse a joint Marc Levy à New York, où il vit.

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Le petit voleur d’ombres, tome 1, texte de Marc Levy, illustrations de Fred Bernard

Le petit voleur d’ombres est une adaptation du Voleur d’ombres, un roman pour adultes que vous avez publié en 2010. Le narrateur, un garçon, a le pouvoir d’entendre les secrets des ombres des personnes qui l’entourent. Comment cette idée vous est-elle venue ?

J’ai gardé des souvenirs de l’enfance, de la magie que représentaient les ombres pour moi. Aussi, en voyant mes enfants grandir, je me suis rendu compte à quel point la prise de conscience de sa propre ombre représente un moment important. Et puis, il y a toute la symbolique de la part d’ombre, de ce que nos ombres représentent.

Ce petit garçon traverse les premières épreuves de la vie : l’arrivée dans un nouveau collège, le départ de son père, etc. Face à tous ces tracas, il découvre qu’il a un pouvoir, à travers la métaphore de l’ombre. C’est le pouvoir d’écouter, de prêter attention aux autres au lieu de les juger. Il se découvre le besoin impérieux de se rendre utile. C’est en se rendant utile qu’il va dépasser sa propre condition et tous ses problèmes.

Se rendre utile, ça vous paraît important en cette époque où les jeunes sont anxieux, parce que le monde autour d’eux va mal ?

Quand on entre dans l’adolescence, on se pose essentiellement des questions importantes sur la vie, sur qui on est, à quoi on sert. Comment vous dire ? Cette inquiétude face à la découverte de la société, je me suis aperçu qu’elle se résolvait beaucoup mieux pour ceux qui décident de participer à la société. D’ailleurs, je trouve que la jeunesse d’aujourd’hui est beaucoup plus engagée et volontaire que ne l’était la génération d’avant.

Le narrateur du Petit voleur d’ombres est amoureux d’une fille de sa classe, Élisabeth. Il dit qu’elle « n’est pas la plus jolie fille du collège, bien mieux que ça, elle est celle qui a le plus de charme ». Même quand vous vous adressez à des enfants, vous parlez d’amour ?

Oui, je crois que l’amour est important. C’est même absolument essentiel. Je crois qu’on n’avance pas dans la vie sans un sentiment qui nous pousse.

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Le petit voleur d’ombres, tome 2, Perdu dans la forêt, texte de Marc Levy, illustrations de Fred Bernard

Après le départ du père, la mère du narrateur lui dit : « C’est notre premier dîner en amoureux, mon chéri. » N’est-ce pas une phrase malheureuse, qui confond les rôles ?

Non, non. C’est une phrase de tendresse. Il n’y a pas de phrases malheureuses en amour, quand la pureté du sentiment prévaut sur tout le reste. Elle lui dit : « C’est notre premier dîner d’amoureux », mais elle aurait pu dire : « C’est notre premier dîner en tête à tête. »

Aimiez-vous lire quand vous étiez enfant ?

Oui, beaucoup. D’abord, on n’avait pas beaucoup d’autres sources de distraction [Marc Levy est né en France, en 1961]. La lecture était quand même un vrai divertissement à cette époque. On n’avait pas de tablettes, et le cinéma, on y allait rarement.

Y a-t-il un livre qui vous a marqué ?

De la Terre à la Lune, de Jules Verne. Je l’avais reçu à la fin d’une année scolaire. J’avais été frappé par la préface, qui racontait qu’au moment de sa publication, Jules Verne avait été beaucoup moqué. On disait : « Mais quelle est cette histoire idiote, où on met un homme dans un boulet de canon pour l’envoyer sur la Lune ? » Le destin a voulu qu’on me remette ce livre quelques semaines avant que ma mère vienne me chercher dans ma chambre pour me faire assister, à 3 h du matin, aux premiers pas de l’homme sur la Lune.

Je me souviens d’avoir été encore plus marqué par l’image qu’on recevait de cap Canaveral. Ces hommes derrière leurs pupitres, à l’époque où l’ordinateur n’était pas entré dans la vie de tout le monde, représentaient le sommet de l’intelligence humaine. Je les ai regardés en me demandant : « Combien sont là parce qu’à mon âge, ils ont lu De la Terre à la Lune ? »

Ça m’a fait comprendre l’extraordinaire pouvoir de l’imagination. Par définition, l’imagination précède la science. Si l’humanité progresse, c’est parce qu’avant tout, il y a eu de l’imagination, qui nous fait dépasser notre propre condition.

Les propos de Marc Levy ont été édités en raison d’un espace limité.

Le petit voleur d’ombres, tomes 1 et 2, Texte de Marc Levy, illustrations de Fred Bernard, collection Versilio, éditions Robert Laffont, dès 8 ans