(Zagreb) L’écrivaine croate Dubravka Ugresic, une des essayistes les plus marquantes d’Europe, est décédée vendredi à l’âge de 73 ans aux Pays-Bas où elle vivait depuis les années 1990, a annoncé son éditeur à Zagreb.

L’écrivaine, évoquée depuis trois ans comme lauréate potentielle du prix Nobel de littérature, est morte à Amsterdam entourée de membres de sa famille et de ses amis, a appris l’AFP auprès de l’Institut multimédia MI2 de Zagreb, éditeur de ses livres.

L’œuvre de Dubravka Ugresic, née le 27 mars 1949 à Kutina, en Croatie, était marquée par une rare combinaison d’ironie, de polémique et de compassion, qu’on retrouve notamment dans ses écrits sur la chute du mur de Berlin en 1989 et la désintégration de la Yougoslavie dans les années 1990.

Dans son pays d’origine, elle était principalement connue pour sa critique du nationalisme et des guerres qui ont éclaté lorsque la Yougoslavie s’est déchirée.

Elle a à l’époque fait l’objet de nombreuses critiques de la part de médias nationalistes, personnalités publiques et pairs, qui l’ont notamment qualifiée d’« antipatriote », de « traître » à la nation et même de « sorcière ».

Son site internet indique qu’elle avait adopté une position ferme « disséquant de manière critique le nationalisme croate et serbe rétrograde, la stupidité et la criminalité de la guerre ».

« Dans ce processus, elle est devenue une cible pour les journalistes nationalistes, les politiciens et les autres écrivains ».

Victime d’un ostracisme public prolongé et d’un harcèlement médiatique persistant, la diplômée de l’Université de Zagreb a quitté en 1993 la Croatie, où la guerre d’indépendance a fait quelque 20 000 morts entre 1991 et 1995. Elle vivait à Amsterdam depuis 1996.

Les livres de Dubravka Ugresic ont été traduits dans plus de 20 langues et elle a remporté de nombreux prix pour ses écrits, dont le Prix international de littérature Neustadt 2016.

Elle a également été finaliste du prestigieux Man Booker International Prize en 2009. Après avoir reçu le prix du meilleur roman en Croatie en 2018 – son premier depuis son départ en 1993 – elle avait dans une interview appelé à plus de multiculturalisme.

« Je crois qu’un État post-national, transnational et interculturel est ce qui convient le mieux à mon tempérament, mon style de vie, mes convictions intellectuelles et idéologiques », avait-elle déclaré au portail internet Tportal.