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Mues complexes

La femme insecte

En Occident, le légendaire Osamu Tezuka est surtout connu pour Astro Boy et Le Roi Léo ; mais il ne s’agit que de l’une des facettes du très prolifique mangaka. Sur des terrains très lointains des aventures fantastiques, il a également tâté les histoires sombres, inquiétantes, tout en campant les enjeux sociaux de son époque. Le livre La femme insecte, paru au Japon en 1970 et qui vient d’être réédité en français, s’inscrit dans cette veine de récits au ton grave destinés aux adultes.

Le manga met en scène Toshiko Tomura, dont le talent semble ne pas avoir de limites : qu’elle touche à la littérature, au design ou à la comédie, des succès étincelants lui sourient invariablement. Mais derrière sa gueule d’ange surdoué se cache un autre visage, bien plus cruel. Pour arriver à ses fins, Toshiko n’hésite pas à recourir à ses charmes, à la manipulation, à la perversion, voire pire. Journalistes, artistes, amants : tous ou presque finissent piégés dans sa toile et vidés de leur substance par cette femme en mue perpétuelle. Évoluant dans la société japonaise mouvementée et patriarcale des années 1970, la femme insecte endosse toutefois tour à tour les rôles de prédatrice et de proie.

  • Planche de La femme insecte

    IMAGE FOURNIE PAR LA MAISON D’ÉDITION

    Planche de La femme insecte

  • Planche de La femme insecte

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    Planche de La femme insecte

  • Planche de La femme insecte

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    Planche de La femme insecte

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Le dessin paraît certes suranné, avec son style et ses rondeurs presque « popeyesques », mais le mystère entourant Toshiko et ses vicissitudes intriguent, soulevant de nombreuses questions au chapitre de l’identité, des mœurs de l’époque, de l’érotisme ou encore de l’ambition dévorante. Aussi faut-il ne pas se laisser leurrer par la naïveté des traits, qui dissimule une certaine complexité autour du personnage principal, tout en dépeignant des évènements ancrés dans l’actualité de cette période de mue sociale au Japon.

On ne peut que saluer les récentes rééditions de ces œuvres de Tezuka aux éditions Delcourt et FLBLB (Phénix, l’oiseau de feu, Avaler la terre, Demain les oiseaux) qui permettent de mieux cerner les différents univers nourris par ce pilier fondateur du monde du manga.

La femme insecte

La femme insecte

FLBLB

Histoire complète
378 pages
n & b

7,5/10

Sylvain Sarrazin, La Presse

Amusantes aventures numériques

Talento Seven

Un petit vent d’originalité souffle à nouveau dans ces pages signées Izu et Kalon, le duo français qui avait livré Versus Fighting Story. Ici, Talento Seven nous propulse dans l’univers des youtubeurs à succès, dans lequel Adel et sa comparse Carla rêvent de percer. La tâche est ardue : non seulement le jeune homme est hypersensible et perd facilement ses moyens, mais en plus, il verse dans le domaine hyper niché du jeu vidéo rétro marginal. Il pourra cependant saisir sa chance à l’occasion d’un concours où les membres du « Talento Seven », youtubeurs les plus influents du web, devront faire mousser un protégé — et le célèbre Benzou (parodie assumée du vidéaste Benzaie) a justement jeté son dévolu sur Adel.

  • Planche de Talento Seven

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    Planche de Talento Seven

  • Planche de Talento Seven

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    Planche de Talento Seven

  • Planche de Talento Seven

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    Planche de Talento Seven

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On adore les références francophones et les nombreuses caricatures des véritables vedettes du Net (dont « Le joueur de la cave » !), les bonus intéressants, le thème original et le respect de tous les codes du manga. Léger et divertissant ! Destiné aux ados numérivores ou aux adultes à l’âme geek interpellés par les jeux vidéo rétro.

Talento Seven

Talento Seven

Kana

Tome 1, n & b

7/10

Sylvain Sarrazin, La Presse

Lucky Luke chez les végés

L’arche de Rantanplan

En arrivant à Cattle Gultch, où il doit prendre en charge un troupeau, Lucky Luke rêve d’un bon steak. Il n’a pas le temps de commander qu’il se mêle à une dispute pour éviter ce qu’il appelle une « justice expéditive » : un groupe de gens fâchés voulaient pendre un homme accusé d’avoir volé un cheval, alors que ce dernier clame avoir simplement voulu soustraire l’équidé aux mauvais traitements qui lui étaient infligés. Ce drôle d’oiseau s’appelle Ovide Byrde et veut faire évoluer les mentalités dans l’Ouest : il a fondé la Société protectrice des animaux de ce coin de pays — et en est l’unique membre. Sa vision des choses — principalement le végétarisme — est loin de faire l’unanimité chez les cowboys, et son idéalisme en fera une cible de choix pour des gâchettes mal intentionnées lorsqu’il découvrira un gisement d’or sur son terrain.

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Planche de L’arche de Rantanplan

Achdé et Jul signent un sympathique album, parsemé de clins d’œil à la pandémie de COVID-19, qui taquine un certain radicalisme végé. Gags bien envoyés, habilement mis en scène, l’album est dynamique et c’est avec un malin plaisir qu’on retrouve Rantanplan, le chien le plus bête de l’Ouest. L’arche de Rantanplan est aussi un album « sensible » : Lucky Luke y verse même une larme, mais on ne vous dira pas pourquoi !

L’arche de Rantanplan

L’arche de Rantanplan

Lucky Comics

48 pages

7/10

Alexandre Vigneault, La Presse

Un Marsupilami à Berlin

L’animal de Humboldt

On ne parlera pas de révisionnisme, plutôt d’univers parallèles : découvert en 1952 par Fantasio dans la série Spirou et Fantasio, le Marsupilami réapparaît « pour la première fois » dans L’animal de Humboldt, où il est raconté que c’est le célèbre scientifique allemand Alexander Von Humboldt qui l’aurait ramené à Berlin d’une expédition en Amérique du Sud en 1801. Oublié dans une caisse fermée — il est sous une forme d’hibernation magique attribuée à la momie rangée à son côté —, le Marsupilami s’éveille en 1931 grâce à une fillette qui l’aidera à rentrer chez lui. La prémisse de cette aventure signée Flix est tirée par les cheveux et le scénario, somme toute banal.

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Planche de L’animal de Humboldt

Avec son alliée, le fantasque animal se promène un peu partout à Berlin et le récit n’a d’autre profondeur que d’évoquer en surface la soif de pouvoir et de reconnaissance des hommes, qui s’exprime ici par la domination sur le règne animal et un fort esprit colonialiste.

Flix signe quelques bons gags (un clin d’œil à la maison des fous des 12 travaux d’Astérix, notamment), mais offre au final une aventure qui manque de ressort.

L’animal de Humboldt

L’animal de Humboldt

Dupuis

56 pages

5/10

Alexandre Vigneault, La Presse

Autres sorties

Tesla Note, Masafumi Nishida, Tadayoshi Kubo et Kota Sannomiya

  • Tesla Note

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    Tesla Note

  • Peach Boy Riverside

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    Peach Boy Riverside

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Parmi les nouvelles séries en français, citons le shōnen (pour ados) Tesla Note, où une jeune fille rompue au ninjutsu fait équipe avec un espion pour retrouver les fragments de Tesla, des cristaux au pouvoir immense.

Plus sanglant, Peach Boy Riverside plante un décor dark fantasy où une princesse éprise de vagabondage rencontre de drôles de personnages, tous animés du désir d’éradiquer des ogres envahisseurs.

Sylvain Sarrazin, La Presse

La carte et le territoire, Michel Houellebecq et Louis Paillard

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La carte et le territoire

Le roman de Michel Houellebecq, lauréat du Goncourt 2010, fait l’objet d’une adaptation en BD par Louis Paillard. L’album est visuellement riche, mais le texte, massif. Il faut s’y atteler. La satire de l’art et de son commerce, entre autres, en vaut le coup.

Alexandre Vigneault, La Presse