La bédéiste québécoise Julie Doucet a remporté mercredi le Grand Prix d’Angoulême, prix qui lui a été remis pour souligner l’ensemble de sa carrière.

Ce prix, le plus prestigieux dans le monde de la bande dessinée francophone, est remis chaque année depuis 1974 lors du Festival international de la bande dessinée d’Angoulême, en France. C’est la première fois qu’un Canadien remporte cet honneur, et la troisième fois seulement que le Grand Prix est remis à une femme.

« Je n’en reviens toujours pas, lance la bédéiste lorsqu’on l’a joint par téléphone à Angoulême. Je suis abasourdie. C’est comme si j’avais reçu un coup de marteau sur la tête ! Remporter le Grand prix d’Angoulême, c’est énorme ; c’est la plus grosse récompense de l’industrie. C’est fou quand on pense que je suis partie d’un petit fanzine au nom pas très net ! »

En effet, c’est en 1990, après avoir rencontré des amoureux de bande dessinée à l’Université du Québec à Montréal, que Julie Doucet a lancé sa première publication : un fanzine photocopié intitulé Dirty Plotte, où elle racontait en français et en anglais son quotidien, ses angoisses, ses rêves… De ce projet sont nés d’autres albums aux noms pas plus propres (dont Ciboire de crisse), jusqu’à ce que la bédéiste quitte la BD en 1999 pour se consacrer à l’art imprimé.

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Couverture du fanzine Dirty Plotte, par Julie Doucet

Un bon choix, selon le directeur artistique du Festival

De toute évidence, le monde de la BD n’a pas oublié l’auteure aujourd’hui âgée de 56 ans, et ce, malgré plus de 20 ans passés sans dessiner le moindre phylactère…

Il faut savoir que depuis quelques années, les lauréats du Grand Prix d’Angoulême sont choisis par un vaste panel composé d’auteurs du monde entier ayant été publiés en langue française. « Plus de 1800 auteurs ont participé cette année, indique Victor Macé de Lépinay, directeur artistique du Festival. Le vote est totalement libre et les auteurs peuvent voter pour qui ils veulent au premier tour. »

Les noms des trois bédéistes ayant terminé en tête lors de ce premier tour sont soumis à un second vote. Pour la première fois de l’histoire du Festival, trois femmes se disputaient l’honneur, soit Catherine Meurisse, Pénélope Bagieu et Julie Doucet.

  • Extrait de l’album Maxiplotte

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    Extrait de l’album Maxiplotte

  • Extrait de l’album Maxiplotte

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    Extrait de l’album Maxiplotte

  • Extrait de l’album Maxiplotte

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    Extrait de l’album Maxiplotte

  • Extrait de l’album Maxiplotte

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    Extrait de l’album Maxiplotte

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« Je pense que le jury a bien choisi, lance Victor Macé de Lépinay. L’œuvre de Julie Doucet se distingue par la force et la radicalité qu’on y trouve. Il y a chez elle une liberté et une indépendance d’esprit totales, ainsi qu’une noirceur et une violence dans les thèmes abordés. Il y a dans son œuvre un féminisme particulier, notamment par les sujets qui sont traités. »

« En France, on l’a redécouvert avec la parution de Maxiplotte, une anthologie très exhaustive publiée récemment par L’Association. Même si l’œuvre de Julie Doucet date de quelques années, elle n’est pas démodée. Elle est si percutante et si radicale ; c’est une vraie claque qu’on reçoit en la lisant. Julie Doucet est aussi une pionnière pour le récit autobiographique, ainsi que pour raconter ses rêves. Elle a une façon très crue et directe de se mettre en scène. C’est une auteure qui mérite d’être reconnue. »

Julie Doucet trône désormais au panthéon de la bande dessinée avec de grands noms comme Franquin, Tardi, Enki Bilal, Régis Loisel ou Art Spiegelman, pour ne nommer que ceux-là. Quel effet ça fait de se retrouver si bien entourée ? « Je ne sais pas, je n’ai pas osé regarder le palmarès, lance Julie Doucet. Je préfère faire abstraction de cette information ! »

Un retour attendu

La grande question que se posent les admirateurs de la première heure : ce prix la convaincra-t-il de revenir à ses premières amours ? « Je ne sais pas ce que je vais faire dans l’avenir, mais j’ai travaillé depuis deux ans à un livre qui est une revisite de la bande dessinée. Il n’y a pas de cases par contre ; c’est une grande fresque en continu qui s’étend sur 130 pages. Mais c’est narratif, c’est autobiographique. Et il y a des bulles ! »

L’album, intitulé Time Zone J, doit sortir en anglais en avril chez Drawn & Quarterly. La date de publication de la version française n’est pas encore connue.