La bédéiste Catherine Ocelot poursuit son exploration de l’âme humaine avec Symptômes, un quatrième album tendre et réconfortant tricoté avec les fils ténus qui nous relient les uns aux autres.

Quatre ans après la parution du très bel album La vie d’artiste (prix Bédélys de la meilleure bande dessinée québécoise en 2018), Catherine Ocelot a ressorti ses crayons et ses points d’interrogation. Car cette artiste à la sensibilité exacerbée préfère de loin les questions existentielles aux réponses toutes faites. Et les doutes inconfortables aux certitudes inébranlables.

Pour son quatrième opus, elle s’attarde avec la délicatesse qui la caractérise à la permanence des relations humaines et aux effets que ces dernières ont sur le corps. « Au départ, j’avais l’intention de faire un album sur l’amitié, raconte la bédéiste. J’avais amassé plusieurs petites histoires au fil des ans. Je me suis rendu compte qu’il était beaucoup question de solitude dans ces histoires. Et avec mon éditeur, on a aussi réalisé que, dans Symptômes, beaucoup de mes histoires tournaient autour de ces fils invisibles qui nous relient aux autres. »

Elle poursuit : « Dans cet album, il est aussi beaucoup question du corps, de la santé et de la maladie. Comment faire pour être en santé, pour être bien, au-delà de faire de l’exercice et de bien manger ? Ces questions m’intéressent depuis longtemps. Tout comme la psychologie. Les gens qu’on côtoie ont de l’influence sur notre santé. Le lien qu’on a avec soi et avec les autres peut être porteur, mais il peut aussi nous miner. »

  • Extrait de l’album Symptômes

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    Extrait de l’album Symptômes

  • Extrait de l’album Symptômes

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    Extrait de l’album Symptômes

  • Extrait de l’album Symptômes

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    Extrait de l’album Symptômes

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    Extrait de l’album Symptômes

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Dans Symptômes, on suit au gré de tableaux entremêlés cinq femmes, toutes membres du groupe Solitudes anonymes. Il y a Mireille, qui a tellement vécu coupée d’elle-même qu’elle s’est coupée des autres. Esther, qui s’est trop souvent noyée dans le chagrin de ses pairs au risque de disparaître. Et Catherine, auteure de bande dessinée un brin hypocondriaque, à la recherche de sa mère intérieure…

Autofiction ? Oui et non

Cette Catherine de papier est-elle la même que la Catherine en chair et en os qui répond à nos questions ? « Oui et non. C’est de l’autofiction, et c’est aussi une mise en scène, des histoires inventées. J’aime jouer avec ces deux dimensions, qu’on ne sache pas ce qui est vrai ou non. Mais une chose est certaine : comme le personnage, je pense que ce serait vraiment le fun d’avoir comme amis la gang de Grey’s Anatomy ! Je me sentirais vraiment en sécurité ! »

En effet, on sent la Catherine de sang et d’os parfois inquiète de la santé : la sienne, mais surtout celle de ses semblables. Pas pour rien que la question de la solitude est omniprésente dans cet album aussi délicat dans le trait que dans le propos.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

« Les gens qu’on côtoie ont de l’influence sur notre santé », croit Catherine Ocelot.

Au fil de ses lectures, celle qui a déjà étudié en art-thérapie a d’ailleurs fait des découvertes étonnantes qui ont alimenté sa réflexion. « J’ai lu un texte sur l’impact physique d’une soirée entre amis un peu poche : le genre de soirée où le courant passe mal et où quelqu’un se fait l’avocat du diable. On peut en mesurer les impacts sur le corps, comme la hausse de cortisol, pendant plusieurs jours ! Des études ont aussi révélé que vivre une grande solitude équivalait à fumer entre 15 et 20 cigarettes par jour. Ne pas être isolé est un facteur qui contribue à la santé. D’ailleurs, il y a un ministère de la Solitude en Angleterre… »

Le corps, on le sait, nous parle. Il nous envoie des signaux que l’on n’écoute malheureusement pas toujours. « Ces métaphores du corps me fascinent. Tout comme notre lien avec les rêves, l’inconscient. Tous ces fils que l’on porte à l’intérieur de nous… Dans l’album, il y a aussi des anges. Ça m’a étonnée au début. Puis j’ai réalisé qu’il existe aussi des fils qui nous relient à ceux qui sont partis. Penser à ma grand-mère fait encore du bien à mon corps. Je la porte encore en moi. »

Autre image récurrente de cet album tout doux : les plantes qui, tantôt luxuriantes, tantôt flétries, sont autant de révélateurs de l’état d’esprit de ceux qui les côtoient. « Il faut préserver les fils qui nous relient aux autres humains, mais aussi tous ceux qui nous unissent à ce qui est vivant. Plus que jamais, il faut prendre conscience des fils qui existent entre nous et notre environnement… »

Symptômes

Symptômes

Éditions Pow Pow

280 pages