Elle a remporté le prix Giller l’an dernier. Reconnue comme l’une des voix « les plus puissantes de sa génération », Souvankham Thammavongsa ne cesse d’émouvoir, par sa prose et surtout son propos, brut et bourré d’émotions.

Pour cause : l’autrice, née dans un camp de réfugiés en Thaïlande, puis élevée à Toronto, raconte ici l’immigration laotienne avec ses tripes. D’anecdotes en apparence banale aux évènements les plus bouleversants, ses courtes tranches de vie, à mi-chemin entre la poésie et le récit, sont déchirantes de vérité : l’humiliation d’une fillette (et de son père, surtout) qui prononce obstinément le k dans knife (couteau), cet ex-boxeur qui se retrouve à genoux à faire des pédicures (abandonnant au passage ses rêves les plus fous) ou encore cette mère de famille qui passe ses nuits accroupie, à cueillir des vers de terre, en épargnant malgré tout sa dignité. « Un travail, c’est un travail, et même dans ceux-là, on peut garder sa dignité », écrira-t-elle, si à propos.

Et c’est exactement ce poignant sentiment qui nous habite, à la lecture de cet inclassable recueil de récits de vies de réfugiés : l’omniprésente (et écrasante) pauvreté, le besoin viscéral de s’intégrer tout en préservant un soupçon de ses origines et, surtout, de sa dignité. Le portrait d’un monde où les vies se rêvent et se désillusionnent, où les enfants grandissent et partent, et où les familles unies se désunissent. Dur et si remuant à la fois.

PHOTO FOURNIE PAR LA MAISON D’ÉDITION

Le K ne se prononce pas, de Souvankham Thammavongsa

Le K ne se prononce pas
Souvankham Thammavongsa
Mémoire d’encrier
128 pages
★★★★