Après l’excellent recueil de nouvelles Cruelles, paru l’automne dernier, les éditions Tête première sont de retour avec un nouveau projet qui, une fois de plus, fait mouche, et sait être prenant sans tomber dans la facilité.

Alors que Cruelles explorait la question de la cruauté au féminin, Épidermes, élaboré sous la direction de Sophie-Anne Landry et de Mattia Scarpulla, s’attarde à différentes formes de manipulation du corps et de façons d’exister à travers lui. « Une infinité de gestes et de relations modèlent notre chair au monde. […] Épidermes pose un regard sur les perceptions corporelles et sur les transformations qui nous construisent », écrivent Landry et Scarpulla dans l’avant-propos du livre.

Le recueil donne à lire des textes d’auteurs et d’autrices comme Fanie Demeule (qui avait codirigé Cruelles), Anne Peyrouse, Anne-Marie Desmeules (dont les courts poèmes s’insèrent entre chaque nouvelle, ponctuant le rythme de la lecture et servant de liant) et Alain Beaulieu (avec l’émouvante et tendre Dans le pli de mon ventre), en plus de ses codirecteurs.

Le résultat est probant, offrant une pléthore d’univers et de récits distincts, ici plus réalistes, ici plutôt campés en terres oniriques, mais liés par ce qui grouille sur et dans nos chairs, dans le fracas des désirs, des peurs, des luttes et des rencontres qui jalonnent les existences. De l’inquiétante Wake, de Fanie Demeule, ouvrant le recueil, où mort et vie s’entrelacent dans une beuverie aux accents rabelaisiens, en passant par la cauchemardesque Effet ambre (Sophie-Anne Landry) et ses statues de cire figées vivantes ou encore l’étonnante Monument (Ariane Gélinas), où un pont en décrépitude échange sa rouille contre la douleur humaine, dont il se délecte, les nouvelles explorent différentes formes d’écriture (prose, poésie narrative) et de narration, surprennent, émeuvent, inquiètent.

Un objet littéraire réussi.

★★★½
Épidermes
Sous la direction de Sophie-Anne Landry et de Mattia Scarpulla
Éditions Tête première
280 pages